jeudi 10 septembre 2015

Les eaux troubles du mojito - Philippe Delerm

Les eaux troubles du mojito et autres belles raisons d'habiter sur terre, de Philippe Delerm

110 pages
Editions Seuil
Parution : Août 2015

4ème de couverture :
Elles sont nombreuses, les belles raisons d’habiter sur terre. On les connaît, on sait qu’elles existent. Mais elles n’apparaissent jamais aussi fortes et claires que lorsque Philippe Delerm nous les donne à lire.Goûter aux plaisirs ambigus du mojito, se faire surprendre par une averse et aimer ça, contempler un enfant qui apprend à lire en bougeant imperceptiblement les lèvres, prolonger un après-midi sur la plage...« Est-ce qu’on est plus heureux ? Oui, sûrement, peut-être. On a le temps de se poser la question. Sisyphe arrête de rouler sa pierre. Et puis on a le temps de la dissiper, comme ce petit nuage qui cachait le soleil et va finir par s’effacer, on aura encore une belle soirée

    Philippe Delerm est un de ces auteurs un peu à part, que l'on retrouve toujours avec plaisir mais dont on n'attend rien de plus qu'un peu de bonheur et qu'il ramène un sourire sur nos lèvres de lecteur.
    On sait en se glissant dans un de ses livres qu'il nous prendra par la main, et nous guidera comme un enfant à la découverte du monde.

    A travers ses recueils de nouvelles ; peut-on d'ailleurs les appeler "nouvelles" ? ce sont plus des morceaux de pensées, des notes d'observations joliment tournées ... donc à travers ses courts textes il nous invite à poser un regard différent sur chacune des petites choses de l'existence, de savourer chaque instant pour sa saveur unique, de regarder autour de soi la vie qui suit son court. A travers ces observations, il nous invite à réfléchir et nous montre la voie du bonheur : le bonheur est fait de petites choses toutes simples. Il n'y a pas un Grand Bonheur universel à atteindre, il n'y a que des petits bonheurs qui mis bout à bout rendent la vie heureuse.

    Dans ce recueil, on est plutôt en bord d'été, avec des petits moments de nostalgie de voyages, de moments passés en famille, d'après-midi en terrasse, des feuilles de menthe dans le verre, des brocantes estivales ... Mais aussi au bord de l'été de la vie, avec Alzheimer, le couple vieillissant, la nostalgie de l'enfance...
    Les deux se mélangent au fil des nouvelles, donnant à ce recueil une petite note de sombre, de tristesse que je n'avais pas perçue dans les autres recueils que j'ai lus jusque là. Comme si son auteur fatigué, un brin désabusé, essayait encore d'y croire et de se raccrocher plus que jamais à ces petits bonheurs tout simple.
    Pour moi ce recueil n'a rien de lumineux ou de léger, je le trouve incroyablement réaliste et terre à terre, et c'est ce qui fait sa force. Cette façon d'aborder les sujets permet de les rendre plus gais, plus vivants. Philippe Delerm a sa petite façon à lui de glisser la phrase juste qui éclairera la situation, amènera un sourire.

    En lisant ce livre, je me suis sentie ancrée plus que jamais dans le présent, dans la réalité, dans la vie de tous les jours, avec ses joies et ses peines. Mais il m'a donné envie de savoir m'arrêter et de me concentrer sur une chose du moment vécu. Il donne envie de prendre une feuille et de poser des mots sur les plus insignifiantes choses, comme pour leur restituer leurs vraies places. J'ai le sentiment que c'est ce qu'il a lui même fait pour écrire chacun de ces textes, qui sonnent comme des réflexions intimes et personnelles. Elles en deviennent impersonnelles tant elles sont communes, et partagées par beaucoup d'entre nous.
   Finalement tous les hommes sont battis sur le même schéma et n'aspirent qu'au bonheur.

    Comme tous les recueils de l'auteur, c'est un petit livre à lire et à relire, en entier ou par passage, au fil de la vie, car ses textes feront d'écho en nous.







    "Attendre, reculer demain. Attendre que les joies dispersées laissent la place à l'idée du bonheur, qui donne le frisson. Juste la nuit qui vient, enfiler un pull. Être si fort ensemble, quand les autres s'éloignent, et qu'on se protège en carré.
- Tu dors, Leila ?
- Non, j'attends la deuxième étoile."


    "Une ville où l'on distingue chaque bruit est une ville de silence."

     "Est-ce vraiment si lourd de vouloir pour l'amour un peu d'éternité ? Les cadenas d'amour sont d'or, le soir ou le matin : il n'est rien de plus léger que la lumière."

     "On se prend dans les bras, comme ça, sur le trottoir d'une rue déserte, ou dans la solitude du sentier des douaniers - on n'avait pas entendu le chien qui arrivait, bientôt suivi de son maître, on fait semblant de ne pas les voir. On reste concentré sur l'autre. Plus de quarante ans que l'on vit ensemble, et quand même l'envie de s'embrasser dès qu'un lieu à l'écart redonne une liberté complice."

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