mercredi 30 septembre 2015

Méfiez-vous des femmes exceptionnelles - Claire Delannoy

Méfiez-vous des femmes exceptionnelles, de Claire Delannoy

263pages
Editions Albin Michel
Parution : 20 août 2015

4ème de couverture :
    Elles se sont rencontrées aux Beaux-Arts quand elles avaient vingt ans et sont restées amies, même si l'une vivait à New York, les autres à Casa, Naples ou Paris. Elles ont connu des amours différentes et des carrières parfois en dents de scie. Elles se sont rarement retrouvées toutes ensemble, sauf ce fameux « été Diesel ». Et maintenant, après la mort du compagnon de Diane, pour affronter ce que les années ont accumulé de demi-vérités ou de vraies trahisons.
   Roman sur l'amitié, ce tissage complexe, subtil et mystérieux qui se nourrit de toutes les strates de la mémoire, Méfiez-vous des femmes exceptionnelles évoque les paradoxes de la liberté et de la fidélité, le faux et le réel dans un monde incertain et éclaté, où chacun s'invente sa vérité.

    Dans ce livre nous suivons principalement Diane, qui vient de perdre son mari, homme qu'elle a épousé lorsqu'elle était jeune et avec qui elle partageait surtout un appartement. Ce fut un mariage coup de tête, imprévu que ces amies n'ont pas compris lorsque cette dernière leur a annoncé le jour même qu'elle s'était mariée. Ces amies Marie, Sofia, Chris et Nour semblent savoir ce qu'elles vont faire de leurs vies. Marie enseignera, Sofia sera architecte, Chris une peintre reconnue et Nour une femme d'affaire accomplie.
    Lorsque Diane revoit ses amies, elle ne peut que constater leurs différencse, elles semblent évoluer dans des mondes différents. Les souvenirs reviennent, amplifiant encore les fossés creusés.
    Il lui est à la fois douloureux et nécessaire d'être avec elles, pour comprendre et parce qu'elles sont tout ce qu'il lui reste dans la vie.

    C'est l'histoire d'une femme qui est restée en retrait, qui a fait passer les autres avant elle, ne se trouvant pas vraiment elle-même. Elle a fait des choix, avec lesquels elle essaye de composer. Mais c'est une femme sensible qui ne crie pas haut et fort que se vie est parfaite. Elle reste en arrière, s'isole dans le silence.
    Ce qui se révèle le plus dur pour Diane, s'est de se rendre compte que durant toute ces années elle a été là où on lui a demandé. Lorsqu'une de ses amies avait besoin d'elle, elle restait auprès d'elle pendant des jours, des semaines, des mois pour les soutenir et les réconforter, mettant entre parenthèse sa vie à elle. Une façon de vivre sa vie par procuration en vivant un petit peu celle des autres ? Absolument pas ! Diane est une jeune femme sensible et très empathique. Elle écoute son coeur et fait ce qui lui semble le meilleur à ce moment là.

   Diane avait construit une vie un peu bancale, où Régis restait un point d'ancrage, malgré leur relation compliquée qui ne la rendait pas heureuse. Forte, elle aménageait le reste de sa vie comme elle le pouvait, pour y trouver un peu de bonheur. On pourrait dire que Diane est une fille simple dans une vie simple.
    Lorsque ce repère disparait, c'est un raz de marée qui la submerge, elle est perdue. Comment reprendre le rythme de sa vie sans le tempo ? Sans cette lumière au loin qui l'attirait et la faisait fuir, tour à tour ? Régis ne lui apportait pas seulement la sécurité financière, car Diane travaille, c'était au delà : un sentiment d'avoir quelqu'un sur lequel s'appuyer, de qui s'occuper, qui pense à elle de temps en temps et à qui penser, ce sentiment de vivre en duo, appuyé l'un sur l'autre, même à distance. Diane avait batti sa sécurité affective et mentale sur ce schéma.

    Lorsqu'elle apprend que Régis avait une fille, alors qu'elle-même avait renoncé à son enfant pensant qu'il n'en voulait pas, c'est le choc. Elle aurait aimé remplir sa vie d'un enfant, mais il est trop tard, elle ne comprend pas. Comment a-t-elle pu passer à côté d'une telle chose ? N'a-t-elle jamais compris Régis ? Où y a-t-il autre chose ? Il lui faut savoir, et pleine de lassitude, déboussolée, elle essaye de recomposer le puzzle dont les pièces semblent égarées chez chacune de ses amies.
    C'est un long chemin, douloureux, c'est une reconstruction d'elle-même qu'elle est en train de faire, pour peut-être enfin devenir vraiment maître de sa vie.

    J'ai beaucoup aimé ce personnage de Diane, un personnage assez discret, qui par moment explose, acerbe et honnête. Elle se raconte, en prenant la voix du narrateur, mais l'auteur donne régulièrement la parole à ces amies, leur permettant ainsi de se raconter, mais surtout de raconter Diane. Si au début c'est un petit peu difficile à suivre au cours de la lecture, on s'habitue vite et on pénètre dans ce quintette féminin. On y découvre des personnalités différentes, fortes, mais aussi des femmes sensibles, vacillantes dans leurs vies mais si elles prétendent le contraire. Des vies où Diane a joué le rôle de pilier grâce à sa gentillesse, mais aussi grâce à son choix d'épouser Régis, même si ça elle ne le sait pas encore.

    Ce livre nous fait nous ouvrir sur les autres. Il ne faut pas juger trop vite le choix de vie de quelqu'un, car peut-être ne s'accomplit-il pas dans un travail ambitieux lui apportant notoriété et richesse, mais il reste essentiel dans la vie de beaucoup par sa présence, son soutien et son indéfectible fidélité.
    Si Diane avait choisi une autre vie, celle de ses amies auraient été différentes. Les amitiés fonctionnent en réseau, s'appuyant et s'enrichissant les unes sur les autres.

   C'est un excellent roman, pas toujours facile à lire, car l'auteur possède une plume et un style bien à elle, mais dont on ressort différent. Ce livre amène à réfléchir, à se questionner sur soi-même, tout ce que j’apprécie d'un bon roman.

    "Elle en aurait pleuré, rien n'allait mais il n'y avait rien à en dire, seul le sentiment d'être déplacée, pas là où il aurait fallu qu'elle soit, mais y avait-il un lieu où elle aurait aimé être."

   "Elle les avait regardées, si sûres de leur nouveau départ, et lui était venue à l'esprit cette expression stupide, refaire sa vie, qu'avait-elle à refaire, elle qui n'avait rien fait, elle se sentait face à elle si démunie, si médiocre, enlisée dans une liberté où seul le renoncement existait."

   "Une curiosité qui vous prend sans que vous sachiez l'endiguer, parfois dans l'autobus à écouter une conversation privée, dans un café à vouloir connaître le livre dans lequel votre voisin est plongé, dans le métro à lire derrière son dos l'article qui attire toute l'attention d'un passager, c'est infini et surprenant la curiosité, la fascination pour ce qui fascine les autres, le désir d'entrer furtivement dans une vie inconnue, d'en saisir un moment de grâce."

   "Et c'est parti, mais madame le génie peut-être admettre qu'il y ait des personnes quel que soit leur sexe qui se foutent d'être reconnues, qui veulent juste vivre leur vie sans être rappelées à l'ordre ni prouver au monde qu'elles ont un talent fou."


mardi 29 septembre 2015

Le choix de la Banshee - Fanny André

Le choix de la Banshee, de Fanny André

69 pages sur ma liseuse
Editions Laska
Parution : Août 2015
Livre électronique

Présentation de l'éditeur :
   Pour Bane la banshee, Dorian est le pire coéquipier possible : un incube, créature au corps de rêve qui n’a de cesse de séduire toutes les femmes. Exactement le genre de comportement qu’elle et ses semblables châtient au quotidien. Et, évidemment, elle n’échappe pas à ses tentatives de drague lourdingues. Cela dit, c’est presque devenu un jeu de le remettre à sa place en utilisant ses pouvoirs.
   Il faut dire qu’elle se le coltine depuis six mois ! Leur mission actuelle est un échec total. Pour preuve les deux armées qui se sont réunies dans cette prairie d’Écosse, prêtes à en découdre dès la nuit tombée : les leprechauns d’un côté, les brownies de l’autre. À moins d’un miracle de dernière minute, ce sera un massacre chez le petit peuple. Cependant, Dorian pourrait bien surprendre Bane…

    Je me suis accordée une petite pause fantasy au milieu de mes lectures contemporaines de la rentrées littéraire. Et pour ça rien de telle qu'une petite nouvelle.

    Dans ce court texte nous rencontrons Bane, un banshee, Dorian un incube et Korena une Fae, tous les trois doivent intervenir pour arrêter une guerre qui s'est déclenchée entre deux peuples à cause d'une sombre histoire de gilet. Cela pourrait être simple si Bane et Dorian ne passait pas leur temps à se chamailler et à se fusiller du regard, et qu'il travaillait un minimum en équipe.
    Sauf qu'il semblerait que les choses ne soient pas vraiment celles que Bane croient...

    C'est une histoire classique de deux tribus qui se détestent depuis la nuit des temps, et dont deux membres se plaisent malgré les haines millénaires. Un instant j'ai cru que l'auteur allait nous surprendre et nous conduire complètement ailleurs, mais non. Certes, elle propose une fin assez sympa et originale, mais on reste tout de même dans le schéma basique.

    C'est une nouvelle, donc l'univers n'est pas très poussé, Fanny André se contente juste de distiller par-ci par-là quelques éléments pour que l'ensemble des personnages fantastiques et la période contemporaine reste à peu près cohérente. Cela fonctionne pas trop mal, dans le sens où la majorité du texte est composé de dialogues entre des personnages.
    Je crois que j'aurais plutôt vu cette histoire sous forme de bande-dessinée, car l'équilibre des dialogues est là, et en l'état cela aurait pu faire un bon premier tome.

    Ma grande question est : est-ce que ce texte est une introduction à un univers et à une saga que prépare l'auteur ? ou n'est-ce vraiment qu'un one-shot ?
    La première réponse aurait pour moi plus de sens, car en tant que grande curieuse j'aimerais en savoir plus.

    J'ai passé un agréable moment avec cette nouvelle, comme j'aurais passé un agréable moment devant un épisode de série. C'est divertissant et mignon.

    "J'observai les lieux. Bien que j'aie peu de retard sur Dorian, je ne le voyais nulle part. Je me dirigeai donc vers cette chaumières qui semblai tout droit sortie d'un vieux conte. le toit traditionnel en ardoise aux abords légèrement recourbés vers le haut, le jardinet et les fenêtres étroites donnaient l'impression que la maison était roulée en boule comme un gros chat endormi."

    "-Wouah ... J'achète. de nos jours, pour te sauter, les mecs te payent à peine un verre, et encore, ils éviteraient s'ils pouvaient. Alors, de sonner la peine de me rouler dans la farine, franchement ? "



lundi 28 septembre 2015

C'est lundi que lisez-vous ? [63]

"C'est lundi ! Que lisez-vous?" C'est une idée originale créé par Mallou, maintenant coordonnée par Galleane.

On répond comme chaque Lundi à trois petites questions :

1. Qu'ai-je lu la semaine passée ?
2. Que suis-je en train de lire en ce moment?
3. Que vais-je lire ensuite ?

Ce que j'ai lu la semaine passée :

Du 21 au 27 septembre 2015
Une belle semaine de lecture. J'ai fini le très chouette livre de Sophia Amoruso, c'était le livre idéal pour recharger mes batteries ! J'ai lu une petite nouvelle et basculé dans la vie étrange d'un artiste avec Alessandro Baricco. Une semaine haute en couleur !
**
*
- #Girlboss, de Sophia Amoruso
 - Le choix de la Banshee, de Fanny André
- Mr Gwyn, de Alessandro Baricco
Ce que je suis en train de lire : 
   
  J'avais gardé ce livre pour le lire à un moment spécial, la lune rousse semblait être le bon moment pour le commencer.
- La nuit de feu, de Eric-Emmanuel Schmitt
À vingt-huit ans, Eric-Emmanuel Schmitt entreprend une randonnée dans le grand sud algérien. Au cours de l’expédition, il perd de vue ses compagnons et s’égare dans l’immensité du Hoggar. Sans eau ni vivres durant dans la nuit glaciale du désert, il n’éprouve nulle peur mais sent au contraire se soulever en lui une force brûlante. Poussière d’étoiles dans l’infini, le philosophe rationaliste voit s’ébranler toutes ses certitudes. Un sentiment de paix, de bonheur, d’éternité l’envahit. Ce feu, pourquoi ne pas le nommer Dieu ?
    Cette nuit de feu – ainsi que Pascal nommait sa nuit mystique –, Eric Emmanuel Schmitt la raconte pour la première fois, dévoilant au fil d’un fascinant voyage intérieur son intimité spirituelle et l’expérience miraculeuse qui a transformé sa vie d’homme et d’écrivain. Les chemins qu’il trace ici sont inscrits en chacun de nous.

 
 Mes prochaines lectures :
Peut-être quelque chose de léger ... à voir :)

Et vous que lisez-vous ?

lundi 21 septembre 2015

C'est lundi que lisez-vous ? [62]

"C'est lundi ! Que lisez-vous?" C'est une idée originale créé par Mallou, maintenant coordonnée par Galleane.

On répond comme chaque Lundi à trois petites questions :

1. Qu'ai-je lu la semaine passée ?
2. Que suis-je en train de lire en ce moment?
3. Que vais-je lire ensuite ?

Ce que j'ai lu la semaine passée :

Du 14 au 20 septembre 2015

Au bord de la mer violette a été plus long à lire que je ne l'aurai cru, c'est un livre très descriptif où il ne se passe pas grand chose. On plonge dans les mots de l'auteur, et on se laisse tranquillement dériver. Il m'a fallu près de 5 jours tourner la dernière page ... Et j'ai ensuite dévoré ce petit livre sur une figure emblématique du siècle dernier.

*

 - Au bord de la mer violette, de Alain Jaubert 
- Charles de Gaulle, l'insoumis 1940-1945, de Céline Anché

Ce que je suis en train de lire : 
   
  A peine ai-je eu ce livre entre les mains, que j'ai eu envie de plonger dedans. Un vrai régal pour le moment.

- #Girlboss, de Sophia Amoruso
Je suis la fondatrice, P-DG et directrice artistique de Nasty Gal. j'ai construit mon entreprise toute seule avant même d'avoir trente ans. Je ne viens pas d'une famille riche, je n'ai pas fréquenté d'école prestigieuse mais j'ai passé des années à me salir les mains en fouillant dans des tas de fripes. En huit ans, je suis passée de l'état de gratuivore anarchiste et fauchée à celui de femme d'affaires aussi à l'aise dans une salle de conférences que dans une cabine d'essayage.
Si je vous raconte mon histoire, c'est pour vous rappeler que le droit chemin n'est pas le seul qui mène au succès.

 
 Mes prochaines lectures :

Je verrais dans quel état d'esprit me laisse ma lecture en cours pour choisir la suivante.
Et vous que lisez-vous ?

jeudi 17 septembre 2015

Entre les deux il n'y a rien - Mathieu Riboulet

Entre les deux il n'y a rien, de Mathieu Riboulet

136pages
Editions Verdier
Parution : 20 août 2015

4ème de couverture :
À l’orée des années soixante-dix, à Paris, à Rome, à Berlin, les mouvements de contestation nés dans le sillage des manifestations étudiantes de 68 se posent tous peu ou prou en même temps la question du recours à la lutte armée et du passage à la clandestinité. S’ils y répondent par la négative en France, ce n’est pas le cas en Allemagne ni en Italie, mais pour les trois pays s’ouvre une décennie de violence politique ouverte ou larvée qui laissera sur le carreau des dizaines et des dizaines de morts, sans compter ceux qui, restés vivants mais devenus fantômes, s’en sont allés peupler les années quatre-vingt de leurs regrets, leurs dépressions ou leur cynisme.
    Témoin de cette décennie de rage, d’espoir et de verbe haut, le narrateur s’éveille au désir et à la conscience politique, qui sont tout un, mais quand son tour viendra d’entrer dans le grand jeu du monde, l’espoir de ses aînés se sera fracassé sur les murs de la répression ou dans des impasses meurtrières. Il aura pourtant eu, dans un bref entretemps, loisir de s’adonner aux très profonds bonheurs comme aux grandes détresses de la politique et du corps aux côtés de tous ceux qui, de Berlin à Bologne, de Billancourt à Rome, de Stammheim à Paris, tentèrent de combattre les forces mortifères qui, dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, s’attachèrent à faire de l’Europe le continent à bout de souffle où nous vivons encore.

    En commençant ce livre je savais que je me plongeais dans quelque chose de différent ; avec les parutions Verdier c'est souvent le cas, et c'est ce qui les rendent si intéressantes. Des textes forts, à l'écriture originale, loin des codes classiques de la littérature, où l'idée est au coeur du texte.

    Dans ce livre l'auteur nous emmène dans les années 70, lors de son adolescence et de sa quête d'identité. Mais comment se trouver et se construire dans un monde d'hésitations, de peurs et de non-dits ? La France des années 70 est une France immobile, témoin des manifestations violentes de ses voisins européens. Si la révolte sourde, elle n'éclatera pas sur le territoire. Cette latence et cette immobilité n'est pas vraiment comprise par la jeune génération qui rêve encore de mai 68. Pour elle, il y a encore tant à faire.
    Frustrés de ne pouvoir rien faire sur place, Mathieu Riboulet et ses comparses, cherchent à s'engager dans les combats de leurs camarades frontaliers. Ils iront en Allemagne, en Italie, mais se retrouvent chaque fois impuissants. Que faire ?
    La liste des morts s'allongent, des morts violentes, à titres d'exemples qui résonnent en eux, mordantes et révoltantes. L'auteur glisse ses morts sans cesse dans le texte, leur rendant ainsi une mémoire, les faisant résonner en nous comme un dernier écho.
    L'auteur a grandit dans une famille qui aime comprendre, qui lorsqu'il est petit, l'emmènera en vacances en Pologne, alors que les tensions demeurent. Ce voyage marquera à jamais le jeune Mathieu, et lui donnera des clefs pour comprendre ses parents, comprendre sa nation, comprendre ceux qui se battent encore.  Ce voyage, il le distille à travers le texte, y revient sans cesse, comme un point d'ancrage, le début de sa conscience.

    L'adolescence est aussi le moment de la quête d'identité sexuelle, et l'auteur se sent attiré par les hommes ; veut faire partie intégrante de cette communauté d'homosexuel qui se battent pour leur acceptation. C'est avec son ami Martin qu'il découvrira son corps et tout ce qu'il peut en tirer de plaisir. Tous les deux décident d'en faire leur arme de bataille. Dans ce monde de frustration, de privation et de reconstruction, les hommes ont besoin de consolation... et il leur semble si facile parfois de leur apporter.

    Politique et sexualité, souvenirs et rêves, vivants et morts se mêlent à travers un texte assez lourd et pesant : comme une marche trop longue dans la boue. Cette période de recherche n'a pas été très confortable pour l'auteur, la lecture ne l'est pas plus pour nous.
    Mathieu Riboulet a su joué avec les mots, les rythmes pour retraduire au plus juste les émotions, les piétinements, les hésitations et les joies qu'il a alors ressenti, nous les faisant partager à l'état brut. Plonger dans ce livre c'est plonger dans un texte intime, qui parfois peut déranger, qui soulève des questions, mais qui permet de comprendre le monde à travers un autre regard.

    C'est un livre que je conseillerais en premier lieu à ceux qui ont connu les années 70, afin que l'écho résonne au mieux en eux. Ce n'est pas un livre que je conseille à tout le monde, car le style et le sujet sont particuliers. Avant de vous plonger dans sa lecture, je vous conseille d'en lire un extrait pour vous faire une idée.
    Mais c'est un livre qui vaut le coup d'être lu, quand on sait à quoi s'attendre, car on n'en ressort pas indifférent, et l'auteur nous donne des clefs pour comprendre notre société actuelle.

    Douze ans c'est déjà mieux que huit, c'est moins absurde, on sent que quelque chose s'approche, on commence à entendre des voix, à percevoir des phrases et non de simples juxtapositions de mots, et pour peu que les adultes ne vous envoient pas voir ailleurs on s'aventure même à leur prêter un sens.

    Les chronologies comme les fictions, sont parfois étouffantes quand on les considère comme telles, qu'on les arpente comme un qui fait les cent pas à la poursuite de la  solution qu'un problème donné lui pose. On fait partie ou du problème ou de la solution. Entre les deux il n'y a rien. Sur le moment bien sûrnul ne se pose la question de savoir à quel degré d'étouffement la réalité nous conduit, même si on se doute qu'il est parfois très haut. On vit et on agit.

    En dehors des livres on ne bâtit jamais de monuments aux morts pour les morts de la paix.

    Ce qui m'a manqué à Auschwitz parce que j'avais douze ans me manque encore aujourd'hui et me manquera toujours, manque aux hommes de raison comme aux hommes de colère, aux hommes de liberté comme aux hommes apeurés, aux hommes de poésie comme aux hommes de rien. Parce que la raison n'est plus d'aucun secours là où surgit le manque. Auschwitz et son silence herbeux, sa désolation sèche, est un grand manque humain au revers de l'Europe, qu'on lui tourne le dos ou qu'on lui fasse face. 

mercredi 16 septembre 2015

Voltaire, Ecraser l'infâme - Isabelle Wlodarczyk

Voltaire, Ecraser l'infâme, de Isabelle Wlodarczyk

123 pages
Editions Oskar, Collection Histoire et Société
Parution : mai 2015

4ème de couverture :
A 70ans, Voltaire est célèbre dans l'Europe entière et n'a plus rien à prouver. Dans ses bons jours, il emploie sa considérable fortune à mettre en valeur la seigneurie de Ferney, près de Genève. Mais le vieux philosophe est plus pugnace que jamais lorsqu'il s'agit de combattre l'intolérance et l'injustice. Accusé d'avoir mutilé un crucifix de bois à Abbeville, le jeune chevalier de La Barre risque la torture et le bûcher. De sa lointaine retraite, Voltaire réussira-t-il à l'arracher aux griffes de l'obscurantisme ?
Un récit pour découvrir et s'indigner, un dossier pour réfléchir et comprendre.


    Dans ce récit romancé, Isabelle Wlodarczyk, nous propose de découvrir un petit peu mieux un instant de la vie de Voltaire, l'un de ses derniers combats contre l'injustice : sa défense du jeune chevalier de la Barre et de ses amis.
    Voltaire nous est souvent présenté à l'école comme un grand philosophe, bourreau de travail, grand penseur qui a révolutionné la façon de penser de son temps. A travers ce portrait, il semble vieux, poussiéreux, fermé dans son cabinet de travail, obnubilé par ses écrits ; comme s'il n'était pas vraiment un homme, seulement une force à penser brute.
    Or Voltaire est avant tout un homme, un homme passionné par le savoir, qui engrange les connaissances comme d'autres les réserves de grain. Tout l'intéresse : l'agriculture, la médecine, l'industrie, ... il aime comprendre chaque chose en détails. Mais c'est avant tout un homme, fait de sensibilité, qui est affecté par l'injustice du monde dans lequel il vit, qui l'a obligé à s'exiler en d'autres terres, et qui lutte de toute son âme pour la dignité humaine et son respect. C'est cette sensibilité qui est son moteur, et qui lui permet de prendre part à des combats tel que celui du chevalier de La Barre.
    A cette époque, les échanges sont longs, les procédures durent des semaines, il faut être patient. Il faut un exutoire à l'angoisse et l'euphorie du "combat". Pour cela, Voltaire cultive sa terre, prend le temps de vivre au rythme de son domaine. C'est celui-ci qui lui donne ensuite l'énergie de s'enfermer des heures durant dans son bureau pour écrire, ré-écrire, ré-ré-écrire, encore les mêmes mots, les mêmes courriers, car il le sait : chaque mot a son poids et il faut l'équilibre parfait pour une défense efficace.
    C'est à Ferney que nous emmène l'auteure, dans cet havre de paix dont Voltaire a fait son bastion. Nous y rencontrons un homme vieux et malade, mais toujours aussi combatif qu'auparavant. Rien ne l'arrête, et il sait qu'il peut compter sur ses fidèles amis.

    J'aime beaucoup ce type d'ouvrage, car il permet d'appréhender les évènements dans leur ensemble et non seulement d'un point de vue purement scolaire. Il met l'homme en avant, dans toute son humanité et ses faiblesses, ses doutes et son assurance. C'est une façon ludique d'apprendre.
    Ce livre est destiné en premier lieu à de jeunes lecteurs, mais il est également parfait pour des adultes. Je pense que je me souviendrais mieux de cette "affaire", comme l'appelle Voltaire, suite à la lecture de ce livre, que ce que j'avais pu en apprendre à l'école. Le côté romancé, sans en faire trop, le développement de l'ensemble des rebondissements, fait qu'il est plus facile de suivre et d'intégrer l'histoire. C'est peut-être bête à dire, mais pour moi "l'affaire" du chevalier de la Barre a à présent un sens. Un sens lourd, profond, qui va au-delà de la défense d'un jeune noble de campagne ; un sens que les livres d'histoire oublie souvent de développer.


    Il est à mes yeux de lectrice et de maman, important d'apprendre en s'amusant, et c'est ce que permet ce livre. J'ai aimé la façon dont l'auteure aborde ce pan de notre Histoire et j'ai aimé sa plume. Elle sait nous tenir en haleine, avec l'envie de savoir non pas le fin mot de l'histoire, mais le déroulement, les rebondissements et les raisonnements de Voltaire. Parfois les péripéties sont plus passionnantes que le dénouement.
    Pour compléter le texte, le livre comprend également une chronologie de la vie de Voltaire, des précisions sur certains points de l'histoire, et la lettre finale écrite par le philosophe. Ce corpus d'annexes complètent parfaitement le texte, sans noyer le lecteur dans les détails inutiles. L'équilibre est parfait.



    "Voltaire était vieux. A son âge supporterait-il une nouvelle bataille ? Le commis aux impôts songeait à tout cela en regardant par la fenêtre le domaine de Ferney, une oeuvre qui se superposait aux livres du philosophe et qui en disait tant sur la grandeur de son esprit : des allées à perte de vue qui paraissaient converger vers un immense théâtre, des champs, des vignes. Tout un monde, une encyclopédie qu'il ne voulait pas voir voler en éclats."

    "A Ferney, dans le pays de Gex, une fois par an, il laboure lui-même ses champs afin d'essayer sa charrue à semoir, une prouesse technologique qu'il est fier de posséder. Ainsi la dernière phrase de Candide, qui invite chacun "à cultiver son jardin",  n'est pas seulement un appel à s'enrichir intellectuellement. Le jardin prend une place importante dans la vie de Voltaire : c'est un lieu de culture !"

mardi 15 septembre 2015

Trouve-moi - Christophe Léon

Trouve-moi, de Christophe Léon

85 pages
Editions Oskar
Parution : mai 2015


4ème de couverture :
Départ en vacance pour Charles-Louis Franchart. Direction Saint-Tropez avec ses parents et les Archambault.
Charles-Louis va vivre le choc des cultures, participer à une folle soirée karaoké et découvrir les incroyables bikinis de Mam'Archambault... Et puis ce sera l'amour, le grand. Il s'appellera Mireille.





    J'ai dévoré ce petit livre à mon retour de vacances, et je n'aurais à nouveau pu mieux choisir. Il semblerait que j'ai été bien inspirée dans mes choix lectures cet été !

    Dans ce petit livre au style très drôle et léger, on fait la connaissance de Charles-Louis, un jeune garçon plein de vie qui se trouve mal parti dans la vie avec un pareil prénom. Ajoutez à cela, un père écolo au possible, et une soeur insupportable, comme toutes les petites soeurs, et votre vie peut tourner au cauchemar. Heureusement, Charles-Louis a de l'humour, et il devient pote avec le fils Archambault, un garçon aussi large que haut que personne n'ose embêter à l'école.
    Si les premiers contacts entre les deux familles sont pour le moins glacials, ils finissent par se transformer en franche amitié, les amenant même à partir en vacances ensemble, dans un petit camping de la Côte-D'Azur.
    Pour Charles-Louis, ces vacances n ngroupe sont une nouveauté. Mais il essaye de se plier au jeu et d'en profiter au maximum.
    Une rencontre va changer ses plans, et métamorphoser ses vacances. Il va faire la connaissance d'une jolie jeune fille différente de toutes les autres, qui se moque pas mal de ce que font les autres ou de ce qu'il faut faire : elle reste elle-même en toute circonstance. Et quand la soirée karaoké, où elle s'est rendue comme tous les occupants du camping, l'ennuie, elle plonge le nez dans son livre, oubliant le monde autour d'elle. C'est cette singularité qui va éveiller l'attention et l'intérêt de Charles-Louis.

    C'est un petit livre remplit d'amour et de joie de vivre. La plume de l'auteur est incisive et pleine d'humour, ce qui en fait un livre qui peut plaire aux plus jeunes lecteurs comme aux adultes.
    Il sait à travers ses mots, nous ramener aux vacances de notre adolescence et aux temps des amours de vacances. Il sait aussi révéler l'adolescent qui se cache encore en nous, et qui sait encore se tomber amoureux au creux de l'été, lorsqu'on est loin de chez soi. Il parle de ces amours légers, pleins de soleil, qui réchauffent le coeur et éveillent l'esprit, bien que platoniques.

    Ce livre est aussi un livre sur la différence. On ne peut imaginer familles plus différentes que celles des Franchart et des Archambault. Et pourtant ça ne les empêchent pas de s'apprécier. La différence des autres peut nous apporter beaucoup. Il y a des échanges de connaissances, de mode de vie, qui permet aux deux familles d'avancer, d'améliorer leur quotidien.
    Mireille est différente de toutes les autres jeunes filles que Charles-Louis a pu rencontrer, et c'est ce qui lui plait chez elle. Elle vit simplement dans le moment, elle ne cherche pas à plaire, elle est elle-même. C'est sa vie qui la façonne ainsi et c'est ce qui fait sa force.
    Ce livre est un appel à la tolérance, à l'écoute et à la compréhension de l'autre, même si sur les premières pages cela semble mal parti. Avant de juger les autres, il faut essayer de connaître leurs vies, essayer de comprendre leurs états d'esprit ; et une fois qu'on a cherché et compris, alors on accepte et on ne juge pas.

    Je me suis régalée avec cette lecture, et je la conseille à tout le monde, de 11 à 111ans, comme l'indique la maison d'édition. Je ne pense pas que l'on puisse s'ennuyer ou se lasser au cours de ce court roman plein d'humour et d'amour !

    "Juliette pratique aussi la danse classique. Dans classique, il faut entendre "comme les autres", "de manière classique". C'est à dire qu'elle se prend les pieds dans le tapis (comme les autres), qu'elle a la grâce d'un hippopotame couvert de boue et batifolant dans un marigot (comme les autres), que son grand écart ne dépasse pas les quinze degrés (comme les autres), et qu'elle a l'air d'un sac à patates dans son justaucorps rose (comme les autres)."

    "Oui, papa a convaincu la famille d'investir dans une Twingo, la voiture la moins polluante sur le marché de l'asservissement de l'homme par la machine. Seul bémol, trois Archambault dans une Twingo ... et la bagnole devient un concept, une oeuvre d'art, un film d'anticipation. Ça déborde de partout. De l'Archambault dans tous les coins. Ca bouche, colmate, remplit. Rajoutez les valises. Touillez. Et servez chaud. J'ai bien dit : chaud. Parce que les cinq cents mètres parcourus pour venir chez nous avaient réussi à faire de la voiture un sauna. Il restait huit cents kilomètres jusqu'à Saint-Pons-Les-Mûres et le camping. Les Archambault auraient fondus d'ici là."

    "Elle était assise sur une chaise, un peu à l'écart et ... lisait ! Comment pouvait-elle lire dans un brouhaha pareil ? La tête légèrement penchée en avant sur son bouquin, elle semblait faire corps avec l'ouvrage."

lundi 14 septembre 2015

C'est lundi que lisez-vous ? [61]

"C'est lundi ! Que lisez-vous?" C'est une idée originale créé par Mallou, maintenant coordonnée par Galleane.

On répond comme chaque Lundi à trois petites questions :

1. Qu'ai-je lu la semaine passée ?
2. Que suis-je en train de lire en ce moment?
3. Que vais-je lire ensuite ?

Ce que j'ai lu la semaine passée :

Du 7 au 13 septembre 2015

J'ai pris le temps de savourer ma lecture en cours. Moi qu espérait la dévorer, je me suis vite rendue compte que ce livre n'était pas fait pour et qu'il valait mieux prendre son temps.

 - Méfiez-vous des femmes exceptionnelles, de Claire Delannoy

Ce que je suis en train de lire : 
   
 J'ai enfin pu commencé ce livre qui me fait de l'oeil depuis que je l'ai reçu. J'espère qu'il sera à la hauteur de mes attentes. Pour le moment je lui trouve un petit charme de l'ancien temps dans l'écriture qui me plait bien. A voir si cela se confirme.

- Au bord de la mer violette, de Alain Jaubert

     Un soir de l’été 1875, deux très jeunes gens, un Français et un Polonais, se rencontrent sur le Vieux-Port de Marseille au temps de sa splendeur. Ils sont profondément marqués par l'Odyssée, par Victor Hugo, par Jules Verne et surtout par Baudelaire. Ils rêvent d’aventures, de mers lointaines, de déserts ou de tempêtes, de peuples sauvages…
    L’un deviendra un célèbre poète français, connaîtra l’exil, l’errance, avant de revenir mourir dans la cité phocéenne. L’autre, marin pendant vingt ans, se métamorphosera en l’un des plus grands romanciers britanniques du XXe siècle. Leurs vies offrent de troublants parallèles, au cœur d’une Histoire mouvementée, de la Commune à la Grande Guerre. Leurs destins croisés composent un vrai roman d’aventures et d’inquiétude. Au lecteur de deviner les noms de ces deux personnages. 


 
 Mes prochaines lectures :

Je pense me plonger dans une petite friandise littéraire, à moins que je n'attende encore un peu pour la déguster ?

Et vous que lisez-vous ?

jeudi 10 septembre 2015

Les eaux troubles du mojito - Philippe Delerm

Les eaux troubles du mojito et autres belles raisons d'habiter sur terre, de Philippe Delerm

110 pages
Editions Seuil
Parution : Août 2015

4ème de couverture :
Elles sont nombreuses, les belles raisons d’habiter sur terre. On les connaît, on sait qu’elles existent. Mais elles n’apparaissent jamais aussi fortes et claires que lorsque Philippe Delerm nous les donne à lire.Goûter aux plaisirs ambigus du mojito, se faire surprendre par une averse et aimer ça, contempler un enfant qui apprend à lire en bougeant imperceptiblement les lèvres, prolonger un après-midi sur la plage...« Est-ce qu’on est plus heureux ? Oui, sûrement, peut-être. On a le temps de se poser la question. Sisyphe arrête de rouler sa pierre. Et puis on a le temps de la dissiper, comme ce petit nuage qui cachait le soleil et va finir par s’effacer, on aura encore une belle soirée

    Philippe Delerm est un de ces auteurs un peu à part, que l'on retrouve toujours avec plaisir mais dont on n'attend rien de plus qu'un peu de bonheur et qu'il ramène un sourire sur nos lèvres de lecteur.
    On sait en se glissant dans un de ses livres qu'il nous prendra par la main, et nous guidera comme un enfant à la découverte du monde.

    A travers ses recueils de nouvelles ; peut-on d'ailleurs les appeler "nouvelles" ? ce sont plus des morceaux de pensées, des notes d'observations joliment tournées ... donc à travers ses courts textes il nous invite à poser un regard différent sur chacune des petites choses de l'existence, de savourer chaque instant pour sa saveur unique, de regarder autour de soi la vie qui suit son court. A travers ces observations, il nous invite à réfléchir et nous montre la voie du bonheur : le bonheur est fait de petites choses toutes simples. Il n'y a pas un Grand Bonheur universel à atteindre, il n'y a que des petits bonheurs qui mis bout à bout rendent la vie heureuse.

    Dans ce recueil, on est plutôt en bord d'été, avec des petits moments de nostalgie de voyages, de moments passés en famille, d'après-midi en terrasse, des feuilles de menthe dans le verre, des brocantes estivales ... Mais aussi au bord de l'été de la vie, avec Alzheimer, le couple vieillissant, la nostalgie de l'enfance...
    Les deux se mélangent au fil des nouvelles, donnant à ce recueil une petite note de sombre, de tristesse que je n'avais pas perçue dans les autres recueils que j'ai lus jusque là. Comme si son auteur fatigué, un brin désabusé, essayait encore d'y croire et de se raccrocher plus que jamais à ces petits bonheurs tout simple.
    Pour moi ce recueil n'a rien de lumineux ou de léger, je le trouve incroyablement réaliste et terre à terre, et c'est ce qui fait sa force. Cette façon d'aborder les sujets permet de les rendre plus gais, plus vivants. Philippe Delerm a sa petite façon à lui de glisser la phrase juste qui éclairera la situation, amènera un sourire.

    En lisant ce livre, je me suis sentie ancrée plus que jamais dans le présent, dans la réalité, dans la vie de tous les jours, avec ses joies et ses peines. Mais il m'a donné envie de savoir m'arrêter et de me concentrer sur une chose du moment vécu. Il donne envie de prendre une feuille et de poser des mots sur les plus insignifiantes choses, comme pour leur restituer leurs vraies places. J'ai le sentiment que c'est ce qu'il a lui même fait pour écrire chacun de ces textes, qui sonnent comme des réflexions intimes et personnelles. Elles en deviennent impersonnelles tant elles sont communes, et partagées par beaucoup d'entre nous.
   Finalement tous les hommes sont battis sur le même schéma et n'aspirent qu'au bonheur.

    Comme tous les recueils de l'auteur, c'est un petit livre à lire et à relire, en entier ou par passage, au fil de la vie, car ses textes feront d'écho en nous.







    "Attendre, reculer demain. Attendre que les joies dispersées laissent la place à l'idée du bonheur, qui donne le frisson. Juste la nuit qui vient, enfiler un pull. Être si fort ensemble, quand les autres s'éloignent, et qu'on se protège en carré.
- Tu dors, Leila ?
- Non, j'attends la deuxième étoile."


    "Une ville où l'on distingue chaque bruit est une ville de silence."

     "Est-ce vraiment si lourd de vouloir pour l'amour un peu d'éternité ? Les cadenas d'amour sont d'or, le soir ou le matin : il n'est rien de plus léger que la lumière."

     "On se prend dans les bras, comme ça, sur le trottoir d'une rue déserte, ou dans la solitude du sentier des douaniers - on n'avait pas entendu le chien qui arrivait, bientôt suivi de son maître, on fait semblant de ne pas les voir. On reste concentré sur l'autre. Plus de quarante ans que l'on vit ensemble, et quand même l'envie de s'embrasser dès qu'un lieu à l'écart redonne une liberté complice."

mercredi 9 septembre 2015

Le secret de Miette - Marie de Palet

Le secret de Miette, de Marie de Palet

308 pages
Editions De Borée
Parution : Mai 2015

4ème de couverture :
   Michel est abasourdi : elle l'aime mais ne peut l'épouser. Miette, la petite sauvageonne dont il est tombé éperdumment amoureux, n'en dira pas plus avant de se sauver en larmes. Quel secret peut-elle bien garder pour donner une explication si confuse ? Michel n'en saura rien. Mobilisé pour la guette de 1870, il part avec l'espoir que la distance et le temps joueront en sa faveur.
   A son retour, c'est pourtant la désillusion : miette est devenue la maman d'une petite Antoinette, dont personne au village ne connaît le père. Que s'est-il passé en son absence ?



    C'est le livre qui m'a accompagnée cet été sur l'île de Beauté. Et je crois que je n'aurais pu choisir meilleure lecture tant les paysans sauvages décrits par Marie de Palet faisaient écho à ceux qui m'entouraient alors.

    Dans ce livre nous rencontrons Michel, un jeune paysan, travailleur et amoureux de sa terre. Il vit au grand air et entretient la ferme où il vit avec sa mère, ainsi qu'une partie des terres de son oncle. La vie s'écoule tranquillement dans la campagne de Haute-Loire.
    Un matin de bonne heure, il trouve la petite Miette qui dort sur le chemin, en plein milieu des bois. Cette rencontre le marquera à tout jamais. Il ne sait pas pourquoi elle est ici, à cette heure si matinale, car elle se sauve sans plus d'explications. Sa sagesse lui conseillera le silence, a-t-il bien fait de se taire ?
    Michel réalise qu'il est amoureux fou de cette jeune fille, il lui semble que le ciel rayonne d'un soleil nouveau, hélas elle se refuse à lui.
    Pourquoi dit-elle ne pas pouvoir l'épouser ? Il n'aura le temps d'élucider cette question, car le voilà appelé sous les drapeaux pour servir son pays.
    L'hiver est rude, les combats lui semblent bien inutiles, et seule la présence d'un ami à ses côtés et le souvenir de Miette le maintiennent en vie en lui insufflant le courage nécessaire à sa survie.
    Lorsqu'il revient enfin au village, il rêve de retrouver la jeune fille et est bien décidé à lui faire dire "Oui". Quelle n'est pas sa surprise lorsqu'il apprend qu'elle est devenue mère en son absence et que personne ne sait qui est le père. Aux yeux de tous c'est une fille perdue, Michel n'a d'autre choix que de se rendre à l'avis général, mais c'est pour lui ses rêves qui s'écroulent. La vie peut-elle être si cruelle aux jeunes gens qui s'aiment ? 
    La vie suit son cours, la jolie Justine pourra-t-elle consolé Michel ? Miette finira-t-elle par révéler son lourd secret ?

    Marie de Palet nous décrit de façon très réaliste la vie des campagnes à la fin du 19ème siècle. Une vie qui tourne autour de la terre, rythmée par les saisons. Une vie de village, où tout le monde se connait, se retrouve le soir autour du feu d'une veillée ou en plein air lorsque vient l'été. Une vie rude mais pleine de petits bonheurs simples, où chacun a une place et un rôle à jouer.
    A travers ses mots, elle sait nous rendre nostalgique de cette vie en communauté, même si on ne la pas connue. Bien sûr, elle nous en peint aussi les limites, et les souffrances qui peuvent survenir d'avoir ainsi sa vie étalée sur la place publique.
    Si Miette avait vécu dans une grande ville, elle n'aurait pas eu à subir une telle opprobre publique, elle aurait pu se noyer dans la foule, et se faire oublier. Dans son village, elle ne peut que se renfermer sur elle-même et essayer d'avancer chaque jour, se sachant observer par toutes et tous.

    Ce n'est pas l'histoire de Miette et Michel qui m'a le plus portée, mais la plume de l'auteure, sa façon de nous décrire les paysages, les travaux des champs et la vie quotidienne. Bien sûr, j'avais envie de savoir ce qu'il adviendrait de ces deux protagonistes, mais j'ai surtout pris le temps d'imaginer et de visualiser les mots que je lisais. J'étais une habitante du village, qui apprend chaque jour les nouvelles en allant au puits ou au four à pain.
     C'est un livre que j'ai pris le temps de lire, mot après mot, page après page ; alors même que je pensais que la lecture en serait rapide, il m'aura fallu plus d'une semaine pour le refermer.
    J'avoue que je ne m'attendais pas à un tel dénouement, ni à une telle évolution de l'histoire. Je ne pensais pas que la tante jouerait ce rôle-là. La fin en elle-même, est assez attendue je pense, mais pour y arriver, Marie de Palet a pris de sacrés détours qui m'ont assez surprise je dois dire !

    Je garde un agréable souvenir de cette lecture, et j'ai très envie de retrouver la très belle plume de Marie de Palet dans d'autres ouvrages. Elle a ce je-ne-sais-quoi qui nous entraine en quelques mots sur le chemin de la rêverie.

    "Attention, a dit Durant, l'honneur d'une jeune fille c'est sérieux ! Ne vas pas nous raconter d'histoires si tu n'en es pas totalement certain car, alors, tu ne remettras jamais plus les pieds chez moi. J'aime les fables, les contes, les plaisanteries, mais les nouvelles du pays il faut qu'elles soient vraies. Ne viens pas nous dire les racontars du coin. "

     Miette n'osait bouger. Elle écoutait la vieille femme égrener sa douleur et ne trouvait pas de mots pour la consoler. D'ailleurs, aucun mot ne pouvait soulager cette immense souffrance qui avait rythmé la vie de Jeanne et Alfred et qu'aujourd'hui elle mettait à nu. Ce regret toujours vivace qui les avait empêchés de goûter le bonheur simple des couples sans histoires...

     Michel était triste, d'une tristesse mêlée de remords. Il se reprochait de n'avoir pas assez aimé sa femme. Il l'avait épousé croyant l'aimer, mais savait, aujourd'hui, qu'il n'en avait jamais été ainsi... Il l'avait entourée et protégée autant qu'il avait pu et peut-être avait-elle pensé être aimée. Mais il savait bien au fond de son coeur qu'elle n'avait été pour lui qu'une amie très chère qui lui avait donné deux enfants... Il avait manqué à leur amour cette étincelle qui éclaire la vie et qui l'illumine tout au long d'une existence.

     Et pourtant quand, comme maintenant, il prenait le temps de repenser à sa vie, à ces années censées être les meilleures de son existence, il était bien forcé de reconnaître que la tranquillité d'esprit et le contentement personnel qu'il avait éprouvés, ce n'était pas le bonheur... Le bonheur, c'était autre chose : c'était l'exaltation qu'il avait ressentie en séchant les larmes de Miette, un jour de printemps.

lundi 7 septembre 2015

C'est lundi que lisez-vous ? [60]

"C'est lundi ! Que lisez-vous?" C'est une idée originale créé par Mallou, maintenant coordonnée par Galleane.

On répond comme chaque Lundi à trois petites questions :

1. Qu'ai-je lu la semaine passée ?
2. Que suis-je en train de lire en ce moment?
3. Que vais-je lire ensuite ?

Ce que j'ai lu la semaine passée :

Du 31 août au 6 septembre 2015

Une semaine placée sous le signe des textes courts. J'ai commencé par le second volet de la série de Julie Forgeron, dévoré en une petite matinée. Et j'ai ensuite plongé avec délice dans le dernier recueil de nouvelles de Philippe Delerm. 

*

- Le trio infernal, T2 : plage, disputes et fan-attitude, de Julie Forgeron
- Le eaux troubles du mojito, de Philippe Delerm

Ce que je suis en train de lire : 
   
Je me suis plongée dans ce livre de la rentrée littéraire, n'en étant qu'au début je me demande où l'auteur veut nous emmener. La construction est assez originale et l'écriture très prenante, j'ai hâte de connaître le fin mot de l'histoire.


- Méfiez-vous des femmes exceptionnelles, de Claire Delannoy

    Elles se sont rencontrées aux Beaux-Arts quand elles avaient vingt ans et sont restées amies, même si l'une vivait à New York, les autres à Casa, Naples ou Paris. Elles ont connu des amours différentes et des carrières parfois en dents de scie. Elles se sont rarement retrouvées toutes ensemble, sauf ce fameux « été Diesel ». Et maintenant, après la mort du compagnon de Diane, pour affronter ce que les années ont accumulé de demi-vérités ou de vraies trahisons.
   Roman sur l'amitié, ce tissage complexe, subtil et mystérieux qui se nourrit de toutes les strates de la mémoire, Méfiez-vous des femmes exceptionnelles évoque les paradoxes de la liberté et de la fidélité, le faux et le réel dans un monde incertain et éclaté, où chacun s'invente sa vérité.
 
 Mes prochaines lectures :

Je choisirai en fonction de mon envie du moment :)

Et vous que lisez-vous ?

vendredi 4 septembre 2015

Les p'tits nouveaux dans ma bibliothèque [10]



    Les vacances se terminent, les écoliers ont pris ou repris le chemin de l'école. Bientôt l'automne commencera à s'installer ... Que le temps passe vite ...

    Je vous retrouve aujourd'hui pour vous présentez les livres qui sont venus rejoindre ma bibliothèque.
Beaucoup de chouettes livres avec lesquels j'ai passé de bons moments !


Certaines chroniques sont déjà publiées, et je vous retrouve très vite pour vous parler des autres :)


Liste des livres cités :
- Tamara, T13 : entre les deux mon coeur balance, Darasse, Bosse & Zidrou
- Alyssa, T2 : Sélection naturelle, Bauthian, Morse, Torta
- Livre en feu, Lucin X. Polastron
- Les mémoires d'une jeune fille rangée, Simone de Beauvoir
- J'apprends à dessiner les personnages
- Méfiez-vous des femmes exceptionnelles, Claire Delannoy
- Le secret de Miette, Marie de Palet
- Anna Pencoat, Catherine Ganz-Muller
- Quand le diable sortit de la salle de bain, Sophie Divry
- La femme qui ne savait pas garder les hommes, Vénus Khoury-Ghata
- Les eaux troubles du mojito, Philippe Delerm
- Entre les deux il n'y a rien, Mathieu Riboulet
- Fable d'amour, Antonio Moresco
- Mr Gwyn, Alessandra Barricco
-  Au bord de la mer violette, Alain Jaubert
- Sur la scène intérieure (Faits), Marcel Cohen
- Peer Gynt, Henrik Ibsen
- Trouve-moi, Christophe Léon
- Les clairs de lune de Théo, Mariane Oestreicher-Jourdain
- La peur au placard, Perrine Leblan
- Le courage en héritage, Calouan
- Charlotte Delbo, poète de la mémoire, Rolande Causse
- Voltaire, Ecraser l'infâme, Isabelle Wlodarczyk
- Charles de Gaulle, L'Insoumis, 1940-1945, Céline Anché


Et vous qu'avez-vous reçu ?