samedi 18 février 2017

Coeur Mandarine - Cathy Cassidy

Les filles au chocolat, T3 : Coeur Mandarine, de CathyCassidy

284pages
Editions Nathan 
Parution : Juillet 2012
Traduit de l'anglais par Anne Guitton

4ème de couverture :
Coeur Mandarine
Je m'appelle : Summer Tanberry
Mon âge : 13ans
Je suis : perfectionniste
Mon style : leggings et robes à la mode
J'aime : la danse, la danse, la danse
Je rêve : de devenir danseuse professionnelle
Mon problème : j'ai l'impression que tout m'échappe au moment où je voudrais tout contrôler...

    Ce troisième volet de la série Les filles au chocolat, est consacré à Summer, la jumelle de Skye, personnage central du tome précédent.
    Summer est populaire, mais également perfectionniste et obstinée, deux qualités qui ne font pas toujours bon ménage. Depuis toujours Summer rêve de devenir danseuse étoile, et cet été une merveilleuse opportunité s'offre à elle : Sylvie Rochelle, la célèbre étoile, a décidé d'ouvrir une académie de danse, et une place au sein de celle-ci sera pour une des élèves du cours que suit Summer.
    Elles sont deux sur la liste des postulantes : elle et son ami Jody. Jody, c'est une fille joyeuse, bien dans sa tête et surtout bien dans son corps d'adolescente qui se forme. Summer, elle, est dans le déni de son corps, et s'obstine sur le chemin de la minceur. Quoi qu'elle fasse, une petite voix dans sa tête la rappelle à l'ordre et la rabaisse. Sa perception du monde est complètement biaisée : les autres sont des menaces car ils ne comprennent rien... Elle triche, elle ment, invente des combines, ...Et si elle pense tromper son monde il n'en est rien. Honey, la grande soeur, adolescente difficile, a pourtant tout remarqué.
    Mais comment faire entendre raison à une adolescente bornée, perfectionniste et obstinée qui ne veut rien entendre et surtout pas la vérité ? Comment le faire quand on est soi-même une adolescente en quête de repères ? D'autant plus lorsque Maman et Paddy sont à l'autre bout de la planète en voyage de noce, et que la fratrie est confiée aux bons soins de mamie Kate ? Et que l'équipe de tournage installée à la maison occupe tous les esprits ?

    L'anorexie est un sujet difficile à traiter, mais ici il est bien traité. Cathy Cassidy, a su trouver les mots pour décrire étape par étape cette descente aux enfers, posant les signaux d'alarme au fil des pages, afin que le lecteur puisse un jour les reconnaître.
    C'est un des problèmes de l'adolescente vis-à-vis duquel on ne peut pas faire l'autruche, les conséquences sur la santé, mentale et physique, sont énormes voir irréversibles parfois. Il faut savoir la détecter à temps pour la soigner, et rendre au malade son estime de soi.
    Ici, c'est Thommy, qui offre son oreille, qui est le soutien silencieux, l'ange qui veille de loin et essaye de donner des remèdes de confiance sans brusquer Summer. Ce serait merveilleux si tous les adolescents atteints de ce trouble pouvaient tous avoir un Thommy, cette maladie ferait moins de ravage.
    Dans notre société où l'on voue un culte au corps et sa minceur, il n'y a rien d'étonnant à ce que ce trouble se développe de plus en plus ; et pas seulement chez les adolescentes, les garçons sont aussi touchés, ainsi que nombres d'adultes.
    Les enfants et les adolescents sont de vrais éponges, leurs cerveaux en formation ne peuvent pas leur donner suffisamment de recul pour éviter de tomber dans de tels pièges mentaux. Il faut certes que les adultes veillent au grain, et il faut surtout sensibiliser les jeunes à ces troubles afin qu'eux-même puisent les détecter dans leur entourage et ainsi tendre la main vers ceux qui souffrent et demander de l'aide pour eux.

    Bien sûr, le livre ne se focalise pas seulement sur l'anorexie de Summer, comme toujours Honey fait des siennes en toile de fond, les amours adolescentes, les copains,... sont présents ...
    Et pour la fin, vous vous doutez bien qu'en laissant cinq adolescentes presque seules à la maison, sans leurs parents, il ne peut arriver qu'une catastrophe... Moi je vous le dis, ils n'ont pas du être déçus de leur retour à la maison Charlotte et Paddy !

    Ca fait bizarre de se voir grandir en accéléré... les gamines sages dans leurs uniformes impeccables sont devenues des ados branchées. Au lieu de parler de poupées et de chevaux, on préfère maintenant discuter de musique, de maquillage et de qui craque pour qui.
On rit, on mâche du chewing-gum et on se remet du gloss dans les couloirs entre les cours, mais je me demande combien de filles aimeraient, comme moi, revenir en arrière, vers une époque plus simple où on n'avait pas à se soucier de soutiens-gorge, de règles et de garçons, où on pouvait jouer aux princesses ou manger une barre de chocolat sans penser aux caolories. Parfois, j'ai l'impression de devoir jouer un rôle. On se parfume avec du déodorant à la fraise, on admire les groupes à la mode et on joue les grandes, en espérant que personne ne verra qu'au fond, on est toutes un peu perdues. A moins que je ne sois la seule à avoir cette impression ? C'est tellement dur de grandir.


- Plus j'y réfléchis, plus je me dis que ça craint, de grandir. On dirait que la nature se moque de nous, c'est du grand n'importe quoi.

samedi 11 février 2017

Coeur Guimauve - Cathy Cassidy

Les filles au chocolat, T2 : Coeur Guimauve, de Cathy Cassidy

290 pages
Editions Nathan
Parution : Février 2012
Traduit de l'anglais par Anne Guitton


4ème de couverture :
Coeur Guimauve 
Je m'appelle : Skye Tanberry
Mon âge : 12ans
Je suis : sentimentale et passionnée
Mon style : chapeaux et robes vintage
J'aime : les histoires romantiques, l'astrologie
Je rêve : d'être aussi populaire que ma soeur jumelle
Mon problème : je ne suis pas faite pour les garçons d'aujourd'hui...

     La vie n'est pas toujours simple à Tanglewood, d'autant plus lorsque cinq jeunes filles doivent co-habiter sous le même toit. D'ailleurs en parlant de toit, il est temps de s'attaquer au grenier, de le vider et de le repeindre pour que Cherry ait enfin sa chambre dans la maison et ne dorme plus dans la roulotte dans le jardin.
    En vidant le grenier, Charlotte et Paddy trouvent les affaires ayant appartenues à une dénommée Clara. Selon la légende familiale cette jeune femme, désespérée qu'on lui interdise d'épouser l'homme qu'elle aime, serait morte en mer. Il n'en faut pas plus pour attiser la curiosité de Skye.
    Passionnée par les vêtements vintage, c'est elle qui hérite de la malle pleine de jolies robes en velours, d'un long manteau vert, de quelques jupons, chapeaux et bracelets. C'est pour elle comme un trésor. En s'appropriant ses vêtements, elle essaye d'imaginer quelle a pu être la vie de cette jeune Clara.
    Summer, la soeur jumelle de Skye, s’effraie de la fascination que Clara exerce sur Skye. D'autant plus quand sa soeur se met à faire des rêves étranges peuplés de gitans, où elle devient Clara elle-même. Les objets peuvent-ils conservés l'âme d'une disparue ? Toujours est-il qu'il donne froid dans le dos à Summer ; mais quoi qu'elle dise, Skye fait la sourde oreille.
    Au fil des semaines qui passent, les questions se bousculent dans la tête de la jeune fille, et pour essayer d'éclairer ses rêves, elle décide de sauter le pas et de lire la correspondance de la jeune fille. Mais que peut-on obtenir de quelques lettres reçues ?
    Elle s'en ouvre à l'un de ses professeurs, et se lance sans le savoir sur la trace de son histoire familiale. Une histoire qui ne finira peut-être pas aussi mal que prévu ...

    L'adolescence est une période difficile de la vie, celle où petit à petit on construit l'adulte que nous serons plus tard. Skye est en perte de repères : son père est parti, sa soeur jumelle plus populaire qu'elle, elle n'a pas de passion aussi prenante que ces soeurs, elle ne se sent aucun talent artistique ... dans une maison de filles sensiblement du même âge comment ne pas se comparer sans cesse ? Il est facile de se dévaloriser; et dans sa fragilité, Skye se replie sur elle-même, et trouve un échappatoire dans ses rêves.
    La vie rêvée lui parait plus simple, plus belle, plus facile, mais surtout : plus en adéquation avec ce qu'elle est. Dans un rêve, on n'a pas besoin de se faire une place, elle est déjà toute faite, et c'est sans heurt que l'on se fond dedans.
    Mais rêver peut-être dangereux, il ne faut pas rester au pays des rêves, il faut revenir à la réalité. Et pour cela Skye est bien entourée. Sa famille ne la brusque pas, mais essaye de la ramener petit à petit dans le bonheur quotidien. Et elle saura trouver des personnes pour répondre à ses questions et interrogations.
    Ses proches sauront la valoriser et lui renvoyer une image positive d'elle-même, qu'elle apprendra à aimer et lui permettra de s'assumer telle qu'elle est. Certes elle n'est pas la plus populaire, et alors ? qu'elle importance vu que tout le monde s'accorde à dire qu'elle est la fille la plus cool du coin ?
    Chacun a son caractère, sa personnalité, et c'est ainsi que les autres doivent apprendre à nous aimer. Jouer un rôle n'est en aucun cas une bonne option.

     J'ai beaucoup apprécié ce second tome. C'est avec plaisir que j'ai retrouvé cette famille recomposée et ses filles hautes en couleurs.
     Ce qui fait la force de ce second volet, c'est que Cathy Cassidy, nous entraîne sur un tout autre terrain que dans le premier tome. Ici se mêle le réel et les rêves, le sujet est très différent, même si la toile de fond reste la même. Si au début de ma lecture j'avais un petit peu peur de m'ennuyer de relire une histoire sensiblement identique, j'ai vite été rassurée et je dois avouer qu'à peine le livre achevé, je me suis jetée sur le tome 3, qui d'après les dernières pages promet d'être passionnant !

    Le regard plongé dans les flammes, j'imagine un garçon au sourire charmeur et aux yeux bleus, un garçon qui s'appelle Finn. Je ferme les yeux pour essayer de retourner dans mon rêve. En ce moment, les rêves me paraissent beaucoup plus simples que la vraie vie.

    - Fais-moi confiance, personne ne peut en avoir marre de toi, Skye. Tu es une des filles les plus cool que je connaisse. Mais... des derniers temps, tu es un peu distante, un peu distraite. Comme si tu t'enfermais dans ton monde. C'est peut-être ça le problème ?
    Je réfléchis. Est-ce que j'ai tort de vouloir me réfugier dans le passé, alors que le présent est si incertain et l'avenir si effrayant ? Je ne pense pas.  

jeudi 9 février 2017

Le Club de la Petite Librairie - Deborah Meyler

Le Club de la Petite Librairie, de Déborah Meyler

416 pages
Editions City
Parution : Février 2014

4ème de couverture :
  Jeune femme brillante, Esme obtient une bourse à l'université de Columbia à New York. Dans cette ville où tout est tellement éphémère, elle tombe amoureuse de Mitchell. Tout va bien. Jusqu'à ce qu'elle soit enceinte : là, Mitchell annonce qu'il s'en va.
    Déterminée à reprendre sa vie en main, Esme trouve un travail dans une petite librairie de quartier, tenue par George, son propriétaire excentrique, et le taciturne Luke dont le rêve est de devenir guitariste. Au milieu des livres, la jeune femme trouve un réconfort bienvenu, tout comme auprès des clients de la librairie qui deviennent des amis et des soutiens.
    Et puis, un jour, Mitchell revient. Esme a-t-elle vraiment envie de lui accorder une seconde chance ? Le bonheur est-il à ce prix ?


    Ce livre c'est MA déception de l'année 2016, et pourtant je suis assez bon public. Comme bon nombre de lecteurs, j'ai du mal à résister à un livre dont le titre contient les mots : livres, bibliothèque, librairie, ... La quatrième de couverture faisait de celui-ci un roman prometteur. Je m'imaginais un livre qui me parlerait de livres, où l'auteur nous parlerait d'auteurs qui consolent, de romans préférés,... mais il n'en est finalement rien ici.

    Esme est une jeune anglaise qui va poursuivre ses études en Amérique. Sur place elle tombe sous le charme de Mitchell, le beau gosse riche et macho. Leur histoire est compliquée. Elle tombe enceinte, décide seule de garder le bébé, se met à travailler à la librairie à côté de chez elle en parallèle de ses études.
    A la librairie elle est bien entourée, le propriétaire et ses collègues sont attentionnés et prennent soin d'elle.
Devenir maman dans ses conditions parait super simple...

    Le premier reproche que je fais à ce roman est son manque total d'originalité. Tous les personnages sont des clichés ambulants, leur comportement est stéréotypé, et ne surprend jamais le lecteur.
    Et pour ceux qui connaissent la série Gilmore Girls, les personnages vous rappelleront tous quelques choses, comme si l'auteur n'avait fait que mélanger un petit peu les caractères des personnages pour les réutiliser. Le pire étant Luke, le parfait sosie de Luke Danes : chemise à carreaux, bourru, solitaire, parlant peu mais super attentionné,... j'ai trouvé cela un peu gros.
    Quant à Esme elle est un mélange des deux Lorelai, moitié Rory : fan de livres, étudiantes, qui tombent sous le charme d'un jeune homme riche assez prétentieux et dont la famille ne l'accepte pas ; moitié Lorelai, qui tombe enceinte jeune, ne veut pas en parler à ses parents, décident de se débrouiller seule.
    Si la comparaison ne pouvait se faire qu'à travers ces grandes lignes, on pourrait se dire que j'exagère et que ce n'est que hasard, mais mille et une petites anecdotes du livre renvoient à la série, et je trouve cela fort dommage.
    Je n'ai clairement pas su m'attacher aux différents personnages, et leur manque de consistance propre y a joué pour beaucoup.


    Une autre chose m'a gênée dans ma lecture : c'est tout le discours sur l'avortement, vraiment radical, de ceux que serine les groupes anti-avortement. Ce discours assez froid et impersonnel, place presque ce roman dans le domaine de la propagande. Un livre n'est jamais innocent, il aura forcément un impact sur son lecteur, et la façon dont ce message est délivrée m'a semblé vraiment agressif et sans appel.
    C'est certes un sujet délicat à traiter, surtout dans un roman, mais il est ici presque central. L'auteur développe et insiste sur ce sujet, alors qu'elle survole les difficultés financières d'élever un bébé, de lui fournir tout ce qu'il faut de matériel ainsi que la couverture médicale... Pas un mot sur les difficultés qu'une mère célibataire va rencontrer face aux nuits blanches, à faire garder son bébé si elle veut pouvoir continuer à travailler pour leur assurer un revenu minimum ... Toutes ces lacunes qui me font dire que c'est un domaine où l'auteur n'a aucune expérience et n'a pas cherché à approfondir le sujet. C'est pour moi trop facile de prêcher sur un sujet aussi important quand il n'est pour soi qu'une vague idée.
    Toutes les mères du monde le diront : il n'est pas facile d'avoir un enfant, que ce soit en couple ou seule. Toutes diront qu'elles ont du se battre chaque jour pour boucler les journées, qu'elles ont été fasse à des difficultés matérielles, sociales, médicales...
     Pour certains un auteur pour être bon ne doit écrire sur ce qu'il ne connait pas, pour d'autres se sera sur ce qu'il connait. Ces deux théories sont défendables, et dans les deux cas demanderont un peu de travail de recherche pour maîtriser au moins le théorie du sujet développé.


     J'ai hésité à abandonner ce livre en cours de lecture, car je ne me voyais pas avancer. J'ai persévéré jusqu'au bout espérant un rebondissement, une surprise,... car je n'aime pas abandonner une lecture. Le fait de l'avoir lu d'un bout à l'autre m'aura au moins donner la possibilité d'émettre un avis complet sur ce roman. L'histoirequ'il développe pourrait être celle d'un téléfilm de l'après-midi, une heure et demi serait amplement suffisant, pas besoin de nous coincer des heures durant entre ces pages pour ne découvrir qu'une médiocre histoire qui ne fera même pas rêver son lecteur.
     Vous l'aurez compris c'est une lecture que je ne vous conseille en aucune façon. Cela me désole, mais il en fallait bien une dans l'année.



mercredi 8 février 2017

Adèle et les noces de la Reine Margot - Silène Edgar

Adèle et les noces de la Reine Margot, de Silène Edgar

285 pages
Editions Castelmore
Parution : Avril 2015

4ème de couverture :
    Adèle en a marre de ses parents, qui ne comprennent jamais rien. Au collège, elle préfère passer du temps avec ses copines qu'étudier. Aussi, quand elle apprend qu'elle doit lire un livre en entier pendant les vacances, c'est une véritable punition...
    Mais dans ses rêves, la nuit, l'impossible se produit ! Adèle est à la Cour, au XVIème soècle, au milieu des personnages de la Reine Margot ! Elle rencontre même un beau jeune homme ...
    Ce qu'Adèle vit en 1572 vaut-il la peine de sacrifier ses amis et sa famille de 2015 ?



    Lorsque j'ai croisé ce livre sur les rayons de la bibliothèque, je ne pouvais que l'emprunter ! Comment résister à un livre avec son prénom dans le titre ? Vous y arrivez vous ? Moi jamais. Mais peut-être est-ce aussi parce que rares sont les héroïnes portant ce prénom ...

    Il y a dans la vie de chacun d'entre nous un livre qui a tout changé. Un roman rencontré par hasard ou une lecture imposée, qui nous a bouleversé, fait avancer, fait réfléchir et fait grandir. C'est le cas ici pour Adèle, une jeune adolescente un peu perdue, encore très touchée par le décès de sa grand-mère, a qui son professeur impose de le lire La Reine Margot de Dumas pendant les vacances scolaires. Pas vraiment ravie, Adèle se laisse prendre au jeu, après qu'a-t-elle d'autres à faire de plus ? A la maison la situation est compliquée depuis la mort de mamie, avec ses amies, tout n'est pas simple... ce roman est une façon de s'évader. En se livrant aux mots, Adèle n'imaginait pas autant ouvrir les portes de son imagination, elle n'imaginait pas se retrouver en personne à la cour du Roi pour les noces de Margot, encore moins tomber amoureuse, se passionner pour la médecine, ...

    Dans ce livre Silène Edgar titille de le lecteur, lui donne envie de toujours en savoir plus, d'approfondir ses connaissances, d'aller au bout de ses curiosités. A travers sa plume, elle sait captiver le jeune lecteur et le guider vers de nouveaux horizons. C'est un roman comme j'aurais adoré en lire lorsque j'étais plus jeune. En tant qu'adulte, je ne me suis pas ennuyée pour autant, j'ai reçu sûrement différemment les messages que souhaite faire passer l'auteur, mais elle a su attirer mon attention de parent à des problèmes adolescents.
    Tous les adolescents se cherchent, c'est le thème central de la majorité des romans pour adolescents, et chaque auteur a sa façon de présenter les choses, de mettre tels ou tels mots plutôt que tels autres sur les émotions, a ses manières de contourner la situation ou au contraire de foncer droit dedans.
    Ici Silène Edgar attire la vigilance sur la facilité qu'ont les jeunes a se déconnecter de la réalité, et si rêver n'est pas dangereux, il faut garder les pieds sur terre. Ici Adèle finit par complètement perdre pied, la réalité lui semble si douloureuse et fade par rapport aux histoires qu'elle se raconte, qu'elle ne saura plus faire la part des choses et ira jusqu'à l'irréparable. La vigilance de son entourage aurait pu prévenir le danger, la ramener en douceur dans le monde réel, mais cela n'a pas été le cas.
     La lecture n'est pas dangereuse, cela aurait pu être un film, une correspondance, un objet, n'importe quoi qui aurait entrainé Adèle dans son imaginaire. Elle fuit le monde, elle s'enferme dans ses rêves.

    Les sauts dans l'histoire apporte de la richesse à ce livre, il charme le lecteur, l'entraine à la suite d'Adèle dans cette histoire captivante. Jouer sur les deux tableaux, rêve - réalité, est très bien joué de la part de l'auteur, ce schéma interpelle plus facilement le jeune lecteur et permet de lui faire passer beaucoup plus facilement les messages ; d'autant plus qu'il a l'impression de vivre plusieurs histoires en une seule lecture, ce qui le satisfait doublement quand il s'agit d'un jeune réticent à la lecture.

     J'ai apprécié le fait que les connaissances se croisent. Dans le milieu scolaire, l'apprentissage est cloisonné, et rare sont les fois où les connaissances d'une matière sont utiles à une autre.
    Dans ce livre, l'auteur montre à son lecteur que dans la vie, les cloisons n'existent plus, ici la science se mêle à l'histoire qui elle-même se mêle à la littérature ; cela donne envie au lecteur d'étendre ses connaissances à tous les domaines et lui dit que nulle connaissance est inutile et qu'un jour chacune d'entre elle peut être utile, voir même : peut vous sauver la vie.

Ce roman a été un agréable moment de lecture. Je serais ravie de pouvoir lire d'autres romans de cet auteur.

    En tout cas, Adèle ne veut plus dormir, elle est curieuse d'en apprendre plus sur le complot qu'elle a cru découvrir : sans doute Alexandre Dumas en parle-t-il, elle ne peut pas avoir simplement inventé ça dans son rêve. Et puis elle veut chercher si Samuel est dans le livre. A-t-il vraiment existé ? Peut-être que ce n'est que le produit de son imagination ? Elle lit donc, avec de plus en plus de passion, jusqu'au matin, pour essayer de trouver des réponses. 

mardi 7 février 2017

Un enfant plein d'angoisse et très sage - Stéphane Hoffmann

Un enfant plein d'angoisse et très sage, de Stéphane Hoffmann

263 pages
Editions Albin Michel
Parution : Août 2016

4ème de couverture :
    Dans ce portrait d'une famille où la tendresse passe mal, on croise une chanteuse qui ne veut plus chanter, un Anglais qui n'aime que les chaussettes et la reine, un petit chien bien imprudent et une égoïste qui veut être ministre. On fait des virées à Londres et à Monaco et une traversée du lac Majeur. Il y a encore des blessures d'amour mal guéries et, bousculant tout ce monde, un enfant qui cherche la liberté.
    Stéphane Hoffmann retrouve ici le ton des Autos tamponneuses, des Filles qui dansent et de Château Bougon. Il aime rire des choses graves et nous émouvoir du spectacle souvent pitoyable des grandes personnes. 


    Antoine est un jeune garçon qui vit entre l'internat en Suisse où ces parents l'ont rangés et la maison de sa grand-mère où il passe les vacances, vu que ces parents n'ont pas de temps à lui accorder. Et tout cela va très bien à Antoine. Quitte à ce qu'ils l'oublient, qu'ils l'oublient complètement et lui fiche la paix, car il y a belle lurette qu'il a appris à ne plus compter sur eux. Mais au fond, Antoine, comme tous les petits garçons aimeraient grandir dans une famille unie, où les passion et travail de chacun ne soient pas les priorités, au détriment des autres membres de la famille. A force de vivre dans ce climat froid, distant et égoïste des adultes, il est devenu solitaire, sauvage et distant. Heureusement que Jojo, le petit chien, saura lui montrer que l'amour et la loyauté sont des réalités de la vie, et qu'elles seules peuvent combler un coeur.

    Si je devais qualifier ce livre, je dirais qu'il est étrange. En effet, à peine ma lecture terminée j'ai eu l'impression de ne presque plus me souvenir de l'histoire. Je me suis dis, qu'il devait faire partie de ces livres auxquels le temps donnent de l'éclat, et que petits à petits les choses se mettraient en place dans mon esprit. Et le temps est passé, et je me suis rendue compte que non. Les seules impressions qui me restaient étaient assez vague : une famille où l'on ne sait pas être parent de génération en génération, où la parentalité ne trouve pas sa place dans un monde d'obligations et de contraintes, et où les clefs manquent pour lui en donner une.
    J'ai alors repris la lecture de ce roman, comment se fait-il que ce texte qui m'avait pourtant captivé sur le moment, n'ait pas laissé de traces dans mon esprit ? J'ai repris ma lecture du début, et sans m'en rendre compte j'ai enchainé les pages, les unes après les autres, facilement, avec plaisir, et s'en presque m'en apercevoir j'avais relu les trois quarts du livre. Devant interrompre me lecture, je l'ai laissé de côté jusqu'au soir, et au moment de me replonger dedans, une évidence : ce que j'avais lu ne m'avait pas marquée, je ne me souvenais plus vraiment de ce que j'avais lu. Pourtant si je relisais quelques pages, je les appréciais, mais c'est comme si les mots à peine lus, s'envolaient. Ce phénomène m'a quelque peu troublée.
   Ce n'est que le lendemain en posant des mots sur le papier, en re-parcourant le livre rapidement, en piochant une page par-ci une page par-là, que j'ai compris.
    Stéphane Hoffmann a réalisé dans ce roman un joli tour de force littéraire. Si l'on reprend les personnages un à un : Baladine, Antoine, Germain, Maggy, Rudyard, Philippe, aucun d'eux ne laisse les autres entrer dans sa vie. Ce sont tous les personnages froids, distants, ils se frôlent, se heurtent, mais jamais ne se plonge tout entier dans des échanges sincères et authentiques. Et nous lecteur, ils ne nous laissent pas plus entrer dans leur vie. Ils sont étrangers aux autres, et nous sommes un des ces autres. Nous lisons leur histoire comme nous surprendrions une conversation dans un bus où lors d'une soirée : nous n'en connaissons pas ou alors vaguement les protagonistes, leur histoire ne intéresse pas plus que ça, nous ne les reverrons sans doute jamais et ce qui leur arrive ne changera rien à notre vie ; c'est à peine si nous nous donnons la peine d'émettre un avis sur l'anecdote.
    C'est vraiment habile de la part de Stéphane Hoffmann d'avoir sur communiquer ce sentiment au lecteur, d'avoir si bien rendu cette distance et froideur des personnages. C'est une belle prise de risque qui est à saluer, d'autant plus que c'était un défi à double tranchant : le livre ne laisse du coup qu'un vague souvenir au lecteur, juste une émotion, ce qui peut vite le faire oublier ; mais ce sentiment de vague, d'oubli, peut aussi être un fabuleux moteur de curiosité : "pourquoi ce livre ne m'a-t-il pas plus marquer alors que j'ai pris plaisir à le lire ?", "pourquoi n'en ai-je rien garder ?", et cela peut donner envie de le relire plusieurs fois.
    Mais au fond est-ce gênant de ne pas se rappeler les noms des personnages, leurs vies et leurs défauts ? Cette vague impression, ce vague souvenir du livre n'est-ce pas l'essentiel du livre ? L'auteur ne nous aurait-il pas ainsi délivrer l'essence même du sujet sans alourdir notre esprit ?
    Je crois que ce livre est une expérience littéraire, et que comme toutes les expériences elle apportera quelque chose à celui qui la tentera. 

    De ce qu'elle a vue dès son enfance, Baladine conclut que l'amour, tel qu'on l'entend généralement, n'est qu'un sous-produit. L'amour, faute de mieux : un élan pour sécréter des hormones que l'on trouve aussi bien et plus dans l'exercice d'une passion. L'amour, surcoté par la société par les besoins de la société. Aimez-vous, nous avons des poussettes à vous vendre. 

    Par expérience, je sais que les adultes se font un monde de tout. Les adultes, c'est tout fragile. Et moi, je suis du genre coriace.

lundi 6 février 2017

C'est lundi que lisez-vous ? [88]

"C'est lundi ! Que lisez-vous?" C'est une idée originale créé par Mallou, maintenant coordonnée par Galleane.
On répond comme chaque Lundi à trois petites questions :

1. Qu'ai-je lu la semaine passée ? 2. Que suis-je en train de lire en ce moment? 3. Que vais-je lire ensuite ?


Ce que j'ai lu cette semaine : 
    
Du 30 janvier  au 5 février 2016
Encore une semaine qui est passée bien vite, je trouve. Pas vous ? J'ai un peu mis de côté Qu'est-ce que la littérature ?, de Jean-Paul Sartre, car je n'avais pas le calme nécessaire ni le temps de m'y plonger cette semaine, je l'ai donc remis à plus tard sachant que je vais bientôt avoir une semaine de calme olympien à la maison et pendant laquelle j'espère pouvoir le terminer.
En attendant, je suis passée à la bibliothèque emprunter la suite de la série des Filles au chocolat, de Cathy Cassidy : Coeur Salé et Coeur Vanille. J'avais besoin de lectures légères, rapides et sûres pour cette semaine assez chargée. Et c'est avec plaisir que j'ai retrouvé la famille Tanberry. 

*

- Coeur salé- Les filles au chocolat T3,5, de Cathy Cassidy
- Coeur Vanille - Les filles au chocolat T5, de Cathy Cassidy



Ce que je suis en train de lire : 
Depuis quelques temps, j'avais envie de me replonger dans un classique : Le Rouge et le Noir, de Stendhal. C'est un roman que j'avais lu, étudié et aimé lorsque j'étais au lycée, mais je me rends compte que je n'en ai aucun souvenir. Il était de m'y replonger.



4ème de couverture :
    "Autrefois, lui disait Julien, quand j'aurais pu être si heureux pendant nos promenades dans les bois de Vergy, une ambition fougueuse entraînait mon âme dans les pays imaginaires. Au lieu de serrer contre mon coeur ce bras charmant qui était si près de mes lèvres, l'avenir m'enlevait à toi [...]. Non je serais mort sans connaître le bonheur, si vous n'étiez venue me voir dans cette prison."








 

  Mes prochaines lectures
J'ai déjà quelques envies, mais je verrais à la fin de cette lecture.

Et vous que lisez-vous ?
Belle semaine livresque à toutes et tous !

dimanche 5 février 2017

Agatha Raisin enquête - La Quiche Fatale - M.C. Beaton

Agatha Raisin enquête - La Quiche Fatale, de M.C. Beaton

320 pages
Editions Albin Michel
Parution : Juin 2016

Traduit de l'anglais par Esther Ménévis

4ème de couverture :
   Sur un coup de tête, Agatha Raisin décide de quitter Londres pour goûter aux délices d'une retraite anticipée dans un paisible village des Costwolds, où elle ne tarde pas à s'ennuyer ferme. Afficher ses talents de cordon-bleu au concours de cuisine de la paroisse devrait forcément la rendre populaire. Mais à la première bouchée de sa superbe quiche, l'arbitre de la compétition s'effondre et Agatha doit révéler l'amère vérité : elle a acheté la quiche fatale chez un traiteur. Pour se disculper, une seule solution : mettre la main à la pâte et démasquer elle-même l'assassin.
   Agatha Raisin, c'est une Miss Marple d'aujourd'hui. Une quinqua qui n'a pas froid aux yeux, fume comme un pompier et boit sec. Sans scrupule, pugnace, à la fois exaspérante et attendrissante, elle vous fera mourir de rire ! 


    Agatha Raisin, Londonienne jusqu'au bout des ongles, a eu ce que l'on peut appeler une belle carrière professionnelle. Mais elle a envie d'autre chose, de vie à la campagne, de calme, d'oisiveté, d'après-midi à boire le thé entre copines. Et bien que des copines avec qui boire le thé elle n'en ait jamais eu, elle décide de prendre sa retraite anticipée et de vendre son agence de relation publique. Elle se choisit un charmant cottage à Carsely, petit village des Cotswolds, qu'elle fait aménager et décorer dans ce qu'elle pense être le plus pur style campagnard, pensant ainsi être à la pointe du chic et en mettre plein la vue à ses futures amies.
    Mais hélas, tout ne se passe pas vraiment comme prévu pour Agatha : ses journées sont désœuvrées et fort longues. Elle qui se plaint de ne pas avoir d'amis, ne montre aucune sympathie pour les gens qu'elle croise sur son chemin, elle est dure, froide, imbue d'elle-même.
     Elle qui pensait devenir l'attraction du village, dès son installation, se retrouve complètement seule et tout juste tolérée. Ayant un besoin maladif de reconnaissance, elle s'inscrit au concours de quiches maison du village, dans le but d'écraser celle qui remporte le titre depuis des années. Mais Agatha ne sait pas cuisiner, elle qui n'achète que des plats cuisinés à la supérette du coin, décide de tricher sans scrupules, et commande une magnifique quiche à Londres. Cette tromperie aurait pu passé inaperçue si le juge du concours ne s'était pas écrouler mort après en avoir déguster une part...
    De là, les ennuis commencent pour Agatha... Mais cette femme au fort caractère, qui n'aime pas être prise en défaut, décidera de tout faire pour démêler cette histoire et confondre le coupable.

    On dit souvent que la première impression est souvent la bonne, et plus généralement la plus marquante. Dans son cas, Agatha Raisin a faut sur toute la ligne : elle est hautaine, froide, limite méprisante, envers les gens qu'elle croise, comme si personne dans cette campagne n'était digne d'elle. Sa vie Londonienne et son orgueil exacerbé lui sont montés à la tête et la laisse seule.
    Comment pouvait-elle imaginer que sa seule installation dans un village tranquille, où tout le monde se connait depuis des années, allait changer la vie des habitants ? Qu'elle serait la vedette dès le seuil de sa maison franchi ? Si à Londres c'est une pointure dans le monde des relations publiques, ici elle n'est qu'une inconnue parmi d'autre. N'est-ce pas paradoxal d'ailleurs qu'elle sache si mal se présenter et se vendre ?
     Et comment pouvait-elle penser que la citadine qu'elle est s'acclimaterait rapidement à la vie calme et monotone de la campagne ? Elle a foncé tête baissé dans un rêve qui n'était qu'une chimère de son esprit.
     Agatha Christie, la grande romancière sera une de ses plus fidèles amies, et vous l'avez compris c'est qui l'inspirera pour mettre son nez partout. Mais n'est pas Miss Marple qui veut, et heureusement. Mais c'est en revanche ce qui va donner son piquant à cette histoire.

     Agatha est certes insupportable, mais elle en devient comique et même ridicule. Ce qui fait de cette lecture, un moment plaisant, léger et agréable. On se laisse entraîner dans l'imagination un peu débordante de cette petite femme grassouillette complètement en décalage avec son entourage.
    L'être humain est fait de paradoxes, et pour notre plus grand plaisir, Agatha Raisin n'y fait pas exception.

     C'est un roman que je vous conseille, pour passer un agréable moment. C'est un livre dans la lignée de ceux de la grande romancière, avec des composantes similaires : village de campagne, petite communauté, investigation par les actions et le dialogue, ... mais avec une grosse dose d'humour supplémentaire. On ne pourrait imaginer deux femmes plus différentes que Miss Marple et Agatha Raisin, et pourtant ...


    Elle éteignit la télé et prit Autant en emporte le vent. Elle s'était fait une joie à perspective d'une lecture vaguement honteuse pour fêter sa nouvelle vie de loisirs, mais elle fut stupéfaite par l'excellente qualité du roman. Il se lisait si facilement que c'en était presque indécent, pensa-t-elle, elle qui n'avait jusque là jamais lu que le genre de livres qu'on lit pour impressionner les autres. Et ainsi, avec le crépitement du feu de cheminée en fond sonore, Agatha poursuivit sa lecture jusqu'à ce que les gargouillis de son estomac la poussent à aller réchauffer son curry. La vie était belle.

   Les idées se bousculaient dans la tête d'Agatha tandis qu'elle rentrait chez elle à toutes jambes et fourrait le korma au micro-ondes. N'était-ce pas ce qui importait dans ces petits villages ? Exceller dans une quelconque tâche ménagère . Si elle, Agatha Raisin, remportait ce concours de quiches, on serait bien obligé de s'intéresser à elle. Peut-être même lui demanderait-on de donner des conférences sur son art à des réunions de l'Association des femmes et d'autres choses du même genre .

samedi 4 février 2017

Coeur Cerise - Cathy Cassidy

Les filles en chocolat, T1 : Coeur Cerise, de Cathy Cassidy


288 pages
Editions Nathan
Parution : Mai 2011
Traduit de l'anglais par Anne Guitton



4ème de couverture :
Coeur Cerise
Je m'appelle : Cherry Costello
Mon âge : 13ans
Je suis : secrète, débordante d'imagination
J'aime : les fleurs de cerisier, les roulottes de gitans
Je rêve : d'être acceptée par mes quatre nouvelles demi-soeurs
Mon problème : je suis amoureuse du petit copain de ma demi-soeur

     Qui n'a jamais entendu parler de la série Des filles au chocolat ? Qui n'a jamais vu leur couverture si mignonnes, pleines de couleur qui attirent si bien le regard ?
     C'est une série qui m'intriguait un petit peu, et que je pensais lire si l'occasion s'en présentait. Et elle s'est présentée, lorsque j'ai croisé les 5 premiers tom es sur les rayons de la bibliothèque, à la section ado, que j'explorais surtout pour me faire une idée du choix proposé que dans l'idée d'y emprunter quelque chose. Je n'ai pas pu résisté ; mais timide je n'ai d'abord pris que le tome 1. Grossière erreur ! Il se laisse dévorer en une soirée et quand la bibliothèque ne rouvre que 4 jours plus tard pour y emprunter la suite, on trouve le temps passablement loin. Heureusement, j'ai toujours quelques livres sous le coude, au cas où !

    Dans ce premier volume, nous faisons la connaissance de Cherry, 13 ans qui vit avec son père dans une petite ville d'Ecosse. Elle a perdu sa maman très jeune et est en manque d'affection maternelle. Elle déteste son école, son père déteste son travail, heureusement qu'ils sont là l'un pour l'autre.
Son père reprend contact avec Charlotte, une connaissance de longue date, la magie opère et c'est bientôt l'amour fou. Au point que Paddy et Cherry rejoigne Charlotte en Angleterre où elle possède un Bed&Breakfast. Mais le truc c'est surtout que Charlotte a quatre filles sensiblement de l'âge de Cherry, et rien n'est jamais simple avec les adolescentes. Il faudra donc à Cherry trouver sa place dans cette nouvelle famille.
    Charlotte saura trouver les mots avec Cherry, elle saura lui donner son propre espace avec la roulotte dans le jardin, et le plus important : elle lui fait confiance, comme elle fait confiance à ses filles. C'est cette confiance qui porte la famille et lui permet de vivre en harmonie, ou à peut près du moins.*
     Car malheureusement, on ne peut pas contrôler les évènements extérieurs, ni la façon dont chacun réagi face à eux. Sinon ce serait trop simple.

    La famille est le sujet central de ce roman. Et même si des tensions naissent, Cathy Cassidy met l'accent sur l'importance des autres et sur l'amour familial. Cette nouvelle famille recomposée est loin d'être parfaite, et cela fait du bien à lire. Car quelle famille est parfaite ? En dehors de celle de Charles Ingalls ?
    Il y aura des mots de trop, des cris, des erreurs de la part des parents et de la part des enfants, des sourires, des projets, .... entre ces pages, et tout cela porte avec bonheur le lecteur qui ne saura pas facilement poser son livre avant de connaître le mot de la fin.

    C'est un livre d'ado pour les ados. Cathy Cassidy a su trouvé le ton juste pour plaire. Elle sait faire passer un message sans braquer, et elle sait rassurer le lecteur. Ces mots portent au-delà du livre, et c'est cette force qui a fait de cette série un tel succès (et ses couvertures très girly).
    C'est un agréable préambule à la série, on apprend à connaître les personnages et à les aimer ; on a hâte de les retrouver dans la suite de leurs aventures.
    Si je n'ai pas été spécialement fan de la fin, je la trouve bien trouvée. Avec elle, Cathy Cassidy a choisi une fin qui plait aux adolescents avec juste ce qu'il faut de frisson, de bêtises, de leçon, de mise en garde et d'amour.

    Pour un moment de douceur et de soleil, je ne peux que vous conseiller de lire cette série. Elle sera également le cadeau idéal pour une adolescente.

    Le passé est un truc dangereux. On peut le revivre à travers une histoire, le rendre plus doux, plus beau qu'il n'est vraiment... mais pendant la nuit, la vérité refait sournoisement surface, et on se réveille avec un goût amer dans la bouche. 

    La dégustation se passe plutôt bien. Papa a testé des parfums comme tiramisu, xérès ou framboises fraîches, qui font l'unanimité. Le curry, la betterave crue et le persil ont moins de succès, mais tout le monde à part lui s'y attendait un peu.
- Il faut repousser les limites du goût, explique-t-il en se forçant à avaler un chocolat à la betterave. Essayer de nouvelles choses. Découvrir des parfums auxquels personne n'avait encore jamais pensé...
- Mais est-ce que les gens ont vraiment envie de découvrir le chocolat à la betterave ? s'interroge Summer à voix haute. Est-ce que le monde est prêt pour ça ? 


    Neuf personnes sur dix aiment le chocolat ; la dixième ment.

vendredi 3 février 2017

Demain les chats - Bernard Werber

Demain les chats, de Bernard Werber


308 pages
Editions Albin Michel
Parution : Septembre 2016



4ème de couverture :
    Pour nous une seule histoire existait : celle de l'Humanité. Mais il y a eu LA rencontre. Et eux, les chats, ont changé à jamais notre destinée.





    Bastet est une jeune chatte comme il y en a des millions sur terre, elle vit avec sa maîtresse dans une jolie maison. La vie se déroule tranquillement jusqu'à ce que sa maîtresse lui amène un compagnon de vie, Félix, qui lui la fera devenir mère, mais surtout jusqu'à ce qu'elle rencontre Pythagore, le chat de la maison voisine.
    Ce chat siamois, a toute l'allure d'un sage, et ce qui intrigue tant Bastet c'est sa connaissance. Grâce à son Troisième Œil, un port USB relié à son cerveau, Pythagore connait et comprend le monde qui l'entoure. Petit à petit il instruit Bastet quand à leur histoire, celle des chats, si étroitement liée à celle des hommes.
    Lorsque les choses se gâtent au dehors, que les humains se retranchent chez eux, Pythagore et Bastet décideront de comprendre ce qui se passe et de trouver une solution, pour sauver leur espèce, convaincus d'être la prochaine à régner sur Terre.

    Ce livre m'a complètement déboussolée. Je ne m'attendais pas à ça, et encore moins de Bernard Werber. Moi qui avait adoré Le Sixième Sommeil, son roman précédent, je me suis sentie déroutée. Il m'a fallu plus de soixante dix pages pour rentrer dans l'histoire, et plus d'une semaine pour achever sa lecture.
    Pour moi ce livre est un livre pour adolescent davantage qu'un livre destiné aux adultes. Ce n'est pas le fait que les protagonistes sont des chats qui me fait dire cela, mais la manière dont il est écrit. C'est une écriture très simple et l'histoire vraiment très fantaisiste.
    L'insistance de l'auteur sur l'instruction de Bastet comme une chance et un privilège, renforce ce sentiment de littérature ado. Et j'avoue avoir trouvé ça un peu ennuyeux.
    Je suis déçue de cette façade presque simpliste de l'ouvrage, parce qu'il renferme pourtant des réflexions sur notre société et notre histoire très intéressantes et poussées. Et si on lit ce livre rapidement sans prendre le temps de repenser à sa lecture ensuite, on peut facilement passer à côté, ce que je trouve fort dommage.
    Certes cette mise en perspective de notre société via les chats est plus facile à écrire, semble moins lourde de jugement,... c'est une idée très intéressante, que j'aurais aimé plus poussée.
    Je pense que ce livre aurait mérité plus de temps de maturation, il donne cette petite impression de vite-fait, il y a quelques passages qui ne sont pas plausibles, d'autres complètement improbables, ...

    Par certains aspects ce livre fait écho avec le précédent, mettant l'intuition et l'ouverture psychique au centre de l'histoire. Le monde paradoxal des rêves semble passionner Bernard Werber, est-ce pour toucher un plus large public qu'il a écrit ce roman? comme un complément plus facile d'accès du précédent ?
    Il dénonce la dualité des esprits ultra-connectés, qui sont dans le visuel, le réel, perdus sans support électronique pour comprendre et réfléchir, des esprits sensibles, qui sont dans l'extra-sensoriel, l'instinct, la logique, l'écoute du monde et de soi-même. Il y a fort à parier que c'est notre instinct qui nous sauvera tous et que l'homme gagnerait à l'écouter plus souvent. Mais l'instinct n'est pas suffisant, il faut lui adjoindre la connaissance pour être vraiment efficace.

    Tous les amoureux des chats apprécieront de découvrir toute l'histoire des chats, la façon dont ils ont "conquis" le monde entier, pourquoi, quels étaient les enjeux de cette propagation. Ce sont les parties qui m'ont le plus plu dans ce roman.

    Dans ce livre Bernard Werber flirte avec les peurs actuelles de conflits mondiaux, de guerre, de destruction, d'attaques surprises ... il essaye de nous donner une vision de ce que pourraient être la ville de Paris en de telle circonstance. C'est une vision qui en vaut une autre, à chacun de se faire une opinion là-dessus. Mais peut-être est-ce une des raisons qui fait que je n'ai pas plus apprécié ma lecture : que ce livre joue et renforce cette peur latente qui petit à petit ronge notre société. C'est idée fait froid le dos et met fort mal à l'aise, je trouve.

    Vous l'aurez compris, ce livre n'a pas été un grand bonheur de lecture pour moi, je le regrette beaucoup car Bernard Werber est un auteur qui peut écrire des textes magnifiques et captivant. Mais je n'abandonnerais pas cet auteur pour autant, je vais juste considérer ce livre comme une erreur de parcours, la publication trop rapide d'un écrit non abouti, après quel auteur n'écrit que de bons livres qui plaisent à tout le monde ?!
Ce livre a su trouvé son public, et a été apprécié par des centaines de lecteurs, je ne peux donc que vous conseiller de le lire afin de vous forger votre propre opinion. N'hésitez pas à le partager avec moi dans les commentaires.


    Les humains ne pas comme nous [...]Ma mère  m'a toujours dit : "Méfie-toi des humains, ils sont imprévisibles".

    Être instruite me semble le plus grand des privilèges et je plains ceux qui vivent dans l'ignorance.

    Celui qui ne possède rien n'a rien à perdre. Je n'ai qu'une peur, c'est d'être possédé. Donc je me prive de tout et je survis sans dépendre de rien ni de personne.

    Finalement, il n'y a que nous, les femelles, qui osons avoir des émotions profondes et les exprimer sans pudeur. Je n'aimerais pas être un mâle, j'aurais l'impression d'être handicapée des sentiments.

    Soudain, je comprends que son accès à internet et la possibilité de tout voir et tout comprendre à travers son Troisième Œil électronique l'ont rendu sourd à ce sens naturel qu'est l'intuition.

    Ma vie n'a pas besoin d'être facile ne parfaite pour être merveilleuse. C'est juste ma manière de la percevoir qui lui donne du sens.

    - Il n'y a jamais eu de révolution aux effets bénéfiques ?
- Qui ont abouti ? Non. En général, après l'enthousiasme des débuts suit une phase de désordre, et enfin un dictateur totalitaire vient remettre de l'ordre et tout le monde est rassuré.


   Est-il possible que les humains aient détruit leur lieu de vie au nom d'un géant qu'ils n'ont jamais vu et qui serait censé les observer depuis le ciel ? Au nom de la méfiance contre les scientifiques ? Au nom de la jalousie ?

jeudi 2 février 2017

Dans les forêts de Sibérie - Sylvain Tesson

Dans les forêts de Sibérie, de Sylvain Tesson

290 pages
Editions Gallimard, Collection Folio
Parution : Avril 2013

4ème de couverture :
    Assez tôt, j’ai compris que je n’allais pas pouvoir faire grand-chose pour changer le monde. Je me suis alors promis de m’installer quelque temps, seul, dans une cabane. Dans les forêts de Sibérie. J’ai acquis une isba de bois, loin de tout, sur les bords du lac Baïkal.
    Là, pendant six mois, à cinq jours de marche du premier village, perdu dans une nature démesurée, j’ai tâché de vivre dans la lenteur et la simplicité. Je crois y être parvenu.
    Deux chiens, un poêle à bois, une fenêtre ouverte sur un lac suffisent à l'existence.
    Et si la liberté consistait à posséder le temps ?
    Et si la richesse revenait à disposer de solitude, d'espace et de silence - toutes choses dont manqueront les générations futures ?
    Tant qu’il y aura des cabanes au fond des bois, rien ne sera tout à fait perdu.


    Trop de mouvement tue le mouvement. Sylvain Tesson grand voyageur et explorateur en prend conscience. Alors qu'il chercher un point de chute où poser ses valises pour quelques temps, c'est tout naturellement qu'il repense à son bref passage au bord du lac Baïkal quelques années auparavant. Où se retirer du monde, au calme, s'accorder le droit à l'immobilité mieux que là où le froid et la glace fige tout pendant de longs mois ?
    C'est l'occasion pour lui de se reconnecter à lui-même, à la nature et à apprendre à aimer la routine et la simplicité du quotidien. A-t-on vraiment besoin de courir sans cesse après le temps ? de se donner des emplois du temps à rallonge au point de ne plus être chez soi que pour dormir ? C'est ce que lui offre sa vie en métropole. Là, seul, dans sa cabane il devra faire face à lui-même, trouver la motivation en lui pour accomplir chaque jour les mêmes gestes : allumer le feu, puiser de l'eau au trou de glace, couper le bois... et ce, malgré le froid et l'inconfort. Ce sont ces gestes simples du quotidien qui sauvent les hommes du Baïkal.

     Pour supporter la solitude et se supporter soi-même, il faut avant tout s'aimer. Il n'y a pas de place pour la dépression ou la dévalorisation de soi.
     Ton corps et ton esprit sont tes outils du quotidien, tu dois apprendre à les apprécier, à en prendre soin et à les respecter, il n'y a que sur eux que tu peux compter.

     Un séjour de six mois dans une cabane au bord d'un lac gelé se prépare minutieusement. Sylvain Tesson s'est prévu de la lecture pour nourrir son esprit et se stimuler, et des cigares, juste pour le plaisir. Il serait une erreur de ne penser qu'aux côtés pratiques d'un tel séjour. Si un bon équipement et une bonne gestion de son alimentation est impératif, se serait une erreur d'oublier les petits plaisirs de la vie.

     Ce texte nous est présenté comme les notes qu'il a inscrites dans son carnet de bord au jour le jour, mais il ne nous est pas précisé si elles ont été retravaillée ou non. Pour moi ce ne sont pas des notes réellement personnelles, on sent qu'elles sont rédigés à destination d'un public, vouées à être lues par des milliers de curieux avides de savoir comment un homme peut vivre six mois dans de pareilles conditions. Cela se sent au travers de ses notes de lectures, de ces réflexions... qui finalement n'ont pas grand chose d'innovant et reflète bien l'état d'esprit des "idéalistes" de notre société de consommation.
    Ce petit côté un petit peu posé, ne m'a sauté aux yeux que plus tard, lorsque j'ai pris le temps de re-feuilleter le livre et d'y repenser. Cela n'a visiblement pas gêné ma lecture, ce qui veut dire qu'il réussit fort bien à faire passer son message et à nous embarquer dans son aventure.
     Cela nous en fait un peu oublier que cette expérience n'a au final rien d'extraordinaire : il y a des dizaines de cabanes habitées de long du lac Baïkal, pareillement prisonnières de l'hiver où des gens vivent, parfois à deux toute l'année, dans neuf mètres carrés, et contraints par des horaires de relevés météorologiques ou des sorties pêches. Sylvain Tesson n'a vécu qu'une partie de l'aventure, car il est oisif. Il dispose de tout son temps pour lui, ce qui lui donne un réel avantage sur ses voisins : il peut se déplacer comme bon lui semble, partir camper la nuit dans les montagnes, en un mot il est libre.

    Une chose qui m'a un petit peu gênée, c'est la consommation extrême qu'il fait de la vodka. Certes les russes en font grande consommation, notamment quand ils se retrouvent, mais de là à descendre la bouteille ou une demi-bouteille seul dans sa cabane ... Comment ensuite prétendre profiter à fond de l'expérience, prétendre éprouver au plus profond de soi l'Ermitage quand on l'embue dans les vapeurs de l'alcool. Cela ne me semble pas honnête envers le lecteur, mais surtout envers lui-même. Il n'est pas un ermite, loin de là, et c'est à peine s'il supporte sa seule présence sans soutien liquide quelques jours. Sylvain Tesson a encore beaucoup de chemin à faire pour savoir trouver le bonheur en sa seule présence. Ce voyage a sûrement été un premier pas sur cette voie, il ne reste plus qu'à espérer qu'il lui ait donné suite une fois rentré en métropole.

    Une question se pose à moi : a-t-on vraiment besoin de partir au bout du monde pour se retrouver face à soi-même ? N'est-ce pas extrême ? Ne peut-on pas trouver l'isolement, le calme et le repos près de chez soi ? Cela semble pourtant possible. Cela n'aurait certainement pas eu le même impact s'il s'était retiré dans les Alpes, mais le résultat aurait pu être sensiblement similaire.
    Pas besoin de partir si loin pour redécouvrir les joies d'une vie simple proche de la nature ; sinon cela serait bien triste.

    Ce qui fait le plus défaut à ce texte selon moi, c'est le peu de vie quotidienne qu'il nous donne. J'aurais aimé savoir comment était la cabane, quels étaient ses repas, comment les préparait-il, comment faisait-il sa lessive et sa toilette ... De tout cela il n'est jamais question, et pourtant cela me semble essentiel pour donner du corps et de la crédibilité à se récit. J'aurais aimé que la vie quotidienne vienne en renfort des réflexions de l'esprit.
    Peut-être est-ce un parti pris de sa part : laisser au lecteur le soin d'imaginer la vie qu'il aimerait avoir en cabane afin de mieux lui faire passer son message. Peut-être cela peut-il fonctionner avec certains lecteurs emportés dans le tourbillon d'une vie métro-boulot-dodo qui rêve de petits coins de paradis au vert où tout serait plus simple. Dans ce cas, mon scepticisme post-lecture vient de là : je ne fais pas parti de la catégorie de lecteurs initialement visés.

     Je sais que je suis indécise, d'un côté j'ai aimé ma lecture sur le moment, je me suis laissée porter par le texte ; mais une fois celui-ci fini, il m'a laissé une sorte d'amertume et une question : "Et ?". Une impression de trop peu, comme de la frustration, mais aussi de lassitude devant certaines réflexions très clichés. Et en même temps certaines autres m'ont semblé nouvelles et inattendues.
    Peut-être ai-je l'impression que l'auteur n'était pas cent pour cent sincère avec nous, mais comment le pourrait-il ? Toutes ses expériences sont médiatisées ... Peut-être que j'en attendais tout simplement trop ?

    C'est cependant un livre fort intéressant à lire, qui sous cette forme originale de carnet de voyage permet de faire passer un certain nombre de messages écologiques et humains, qu'il est urgent de diffuser le plus largement possible.
    A lire absolument sous un plaid avec une tasse de thé noir bien chaud sous la main, voir avec de grosses chaussettes aux pieds, parce que toute cette glace et toute cette neige !
    Je pense que je vais laisser passer un peu de temps et que je reprendrais cette lecture afin d'essayer d'y voir plus clair sur mon ressenti.

    La dernière caisse est une caisse de livres. Si on me demande pourquoi je suis venu m'enfermer ici, je répondrai que j'avais de la lecture en retard. Je cloue une planche de pin au-dessus de mon châlit et y range mes livres. J'en ai une soixantaine. A Paris, j'ai pris grand soin de constituer une liste idéale. Quand on se méfie de la pauvreté de sa vie intérieure, il faut emporter de bons livres : on pourra toujours remplir son propre vide. L'erreur serait de choisir exclusivement de la lecture difficile en imaginant que la vie dans les bois vous maintient à un très haut degré de température spirituelle. Le temps est long quand on n'a que Hegel pour les après-midi de neige.

    Une fuite, la vie dans les bois ? La fuite est le nom que les gens ensablés dans les fondrières de l'habitude donne à l'élan vital. Un jeu ? assurément ! Comment appeler autrement un séjour de réclusion volontaire sur un rivage forestier avec une caisse de livres et des raquettes à neige ? Une quête ? Trop grand mot. Une expérience ? Au sens scientifique, oui. La cabane est un laboratoire. Une paillasse où précipiter ses désirs de liberté, de silence et de solitude. Un champ expérimental où s'inventer une vie ralentie. 

    Le luxe n'est pas un état mais le passage d'une ligne, d'un seuil où, soudain, disparaît toute souffrance. 

    [...]je ne savais pas que cette lecture me mènerait en cabane. Il est dangereux d'ouvrir un livre.

     Qu'est-ce que la société ? Le nom donné à ce faisceau de courants extérieurs qui pèsent sur le gouvernail de notre barque pour nous empêcher de la mener où bon nous semble.

    Comment mesurer le confort de ces jours libérés de la mise en demeure de répondre aux questions ? Je saisis à présent le caractère agressif d'une conversation. Prétendant s'intéresser à vous, un interlocuteur fracasse le halo du silence, s'immisce sur la rive du temps et vous somme de répondre à ce qu'il vous demande. Tout dialogue est une lutte.

mercredi 1 février 2017

Chemin de fer - Michel Joiret

Chemin de fer, de Michel Joiret

145 pages
Editions Mode Est-Ouest (M.E.O)
Parution : Juillet 2016

4ème de couverture :
    Un circuit sur la moquette : rails, motrice, quatre wagons, la gare, le sifflet… Une enfance comme un voyage perpétuellement fantasmé. Jusqu'à ce que la famille se dédouble, deux chambres en alternance, plus de place pour le circuit et presque plus d'enfance…
    La retraite venue, Valentin Duvalois restaure son rêve : un appartement proche de la gare du Midi, les songeries sur un quai d'où il ne partira jamais, le précieux album des coupons mauves d'autrefois… Les départs et les arrivées des autres accélèrent le passage des jours.
    Roulements des boggies, sourire de la jeune Africaine qui officie au snack, trilles du canari Aristote un présent de son ami Karim, l'épicier de la rue. Puis cette grève des cheminots, pétards le jour, silence la nuit… Et ce wagon éclairé sur une voie latérale. Immobile, improbable.


    La première chose qui surprend lecteur s'est toute la poésie de l'auteur. Michel Joiret sait jouer avec les mots, les phrases, les rythmes, les émotions, ... et nous donne un texte qui nous captive et nous va droit au coeur. J'ai aimé lire ce livre, que je n'ai pas pu lâché avant la fin ; et j'ai aimé en relire de longs passages. Car oui, il m'a été nécessaire de reprendre ma lecture, car je me suis rendue compte que portée par les mots, certains passages de l'histoire ne s'était pas inscrits dans ma mémoire. Mais peut-être parce que c'est un récit très riche, très fourni et musicalement fort bien écrit ?!

     Dans ces pages nous rencontrons Valentin, homme à la retraite habitant près de la gare du Midi. C'est un homme seul, qui l'a toujours été, et dont les journées est rythmée par les arrivées et départs de trains. Il aime à se rêver voyageur, il aime l'ambiance de la gare, et s'il ne s'y rend qu'un jour sur deux, il prépare avec soin sa valise les autres jours. Sait-on jamais, si l'envie lui prenait de franchir le pas et de monter dans un train, autant être préparé ! Et puis faire sa valise n'est-ce pas déjà voyager un petit peu ? N'est-ce pas le moment où l'on imagine sa destination, ce que l'on fera une fois arrivé là-bas, du temps qu'il fera, etc ...

    Mais Valentin ne franchit jamais le pas. Il reste là où il est. Si les gares sont des lieux d'attentes, elles sont avant tout des lieux de mouvements et de départs. Les gens qui circulent sur les quais savent où ils vont, leur esprit est déjà à moitié parti. Mais pour prendre un train, il faut avoir quelque part où aller... ce que Valentin n'a pas. Pourtant seul, il est libre d'aller où bon lui semble, mais pour quoi faire ?

    Karim, l'épicier du quartier, lui a offert un canari, pour rompre la solitude, pour lui donner envie de rentrer chez lui et lui donner le sentiment d'être aimé et attendu. Il est important pour tout Homme de savoir qu'il est attendu quelque part, ne serait-ce que par un oiseau dans un petit appartement ; c'est une destination, un port d'attache.

    Valentin est en partance depuis l'enfance. Tout petit il se réfugiait dans le rêve grâce à son circuit de chemin de fer. Il rêvait de parcourir le monde, d'explorer les gares, de voir défiler des kilomètres de paysage à travers les vitres d'un train. Mais pour lui le rêve s'est brisé le jour où ses parents se sont séparés. Il a ce même jour perdu les repères familiaux et son refuge. Ce train électrique, refuge de son enfance, lui est retiré et relégué à la cave faute de place. Comment survivre, lorsqu'enfant on nous retire la possibilité d'en être un ? Ce n'était pas un geste voulu de sa mère, juste une conséquence d'un manque de place. L'amour des trains n'a pas quitté Valentin, et à défaut de retrouver son circuit dans sa chambre, il a cherché refuge dans les gares. Lignes, heures de départ et d'arrivées n'ont plus de secret pour lui, et n'en auront plus jamais.
    Ce qu'il y a de bien avec les trains, c'est qu'ils sont là, 7 jours sur 7, 365 jours par an. Fidèles au rendez-vous donnés, ils ne déçoivent jamais.
      Sauf en cas de grèves... hantise absolu de Valentin. Pourtant ne serait-ce pas l'une d'elle qui pourrait lui donner le courage d'un jour franchir le pas ? de dépasser ses limites ? d'enfin oser?

    Ce roman a un petit quelque chose de fascinant, je ne saurais dire si cela vient de l'histoire, du sujet, de la façon dont le récit est construit, de la plume de l'auteur ou de tout cela à la fois. N'hésitez pas à vous plonger dans ce texte, qui saura vous charmé par son originalité et son personnage si attachant.
    Je vous laisse avec quelques extraits :

    A l'école, il cherchait des lieux de solitude pour exsuder sa peine : jardinets, toilettes, lavabos, salle de gymnastique en perpétuelle réfection ... Personne n'avait rien à lui dire et lui avait surtout envie de se taire... A qui parler des grands espaces, du sifflement des locomotives, des gares assoupies brutalement réveillées par le passage d'un expresse ?

    C'est à dix-sept ans que Valentin prit la décision d'inventer sa vie. Faute d'avoir vécu, il lui resterait à s'illustrer à travers les hauts faits d'armes de la mémoire ...
    Par procuration.


    Depuis quelques mois, il ne savait plus comment porter sa solitude : par le bras, comme une compagne des années claires ; à la main, tel un sac à provisions ; sur la tête, comme les paysans d'Anatolie ; au bout des doigts, ainsi qu'on reçoit un faucon dressé, ou même dans le crâne, jusqu'à la migraine qui le prenait par surprise de plus en plus souvent...

    Partir, c'est franchir le pas défendu, se saisir des ailes de l'aigle et s'envoler avec lui !
    Franchir le pas !...