mardi 31 octobre 2017

Sur l'écriture - Charles Bukowsky

Sur l'écriture, de Charles Bukowsky

Textes rassemblés par Abel Debritto
318 pages
Editions Au Diable Vauvert
Parution : Septembre 2017
Traduit de l'américain par Romain Monnery

4ème de couverture :
    Une anthologie de textes inédits sur l'écriture, le quotidien d'une véritable légende américaine, icône de la contre-culture.
    Ces lettres aux éditeurs, directeurs de revues, amis et confrères écrivains pour la première fois publiées, dessinent un portrait intime du grand poète tour à tour poignant, glacial, iconoclaste et souvent hilarant. On y découvre le rapport inquiet au travail, l'érudition littéraire, mais aussi le mordant, l'intransigeance de celui qui a donné voix aux opprimés et dépravés de la société, dans des phrases mémorables ponctuées de moments de grâce. 


    Comme vous avez du vous en rendre compte, ces derniers temps je suis très intéressée par le point de vue des auteurs sur leur relation à l'écriture. Je ne pouvais donc que craquer pour ce livre.
    J'avoue ne jamais avoue lu Bukowsky, mais je sais qu'il fait parti des grands noms de la littérature américaine, et que je vais essayer de me plonger rapidement dans un ou deux de ces écrits, car ce recueil de lettres à plus qu'éveiller ma curiosité.

     Ce livre est un recueil de diverses lettres que Charles Bukowsky a envoyées à des amis et éditeurs, parfois inconnus de lui, tout au long de sa vie. Elles ne sont pas toujours reproduites en intégralité et ont été sélectionnées avec soin afin de rendre au mieux la vie que fut celle de cet écrivain très prolifique et obsédé de l'écriture ; mais aussi afin de rendre au mieux le chemin de sa maturité littéraire.

     Charles Bukowsky fut un de ces idéalistes pour qui le matériel n'avait que peu d'intérêt. Les mots lui brûlaient les doigts et il n'était jamais plus heureux qu'assis des heures derrière sa machine à écrire, quelques canettes de bière à portée de main. Il composait des poèmes à la chaine, au fil de son inspiration, sans jamais se relire ou y apporter la moindre modification et surtout sans jamais se censurer. Il inondait les journaux littéraires de ses productions, espérant vendre par-ci par-là un poème ou deux qui permettrait d'améliorer un peu l'ordinaire.
     Il lui faudra des années et manquer perdre la vie, pour la remettre un peu d'aplomb et se remettre à écrire.
     Il devra sa notoriété en partie à John Martin qui décidera de placer sa confiance en lui et de publier son premier roman. Cet éditeur sait se montrer habile, et créer le manque chez le lecteur, ne publiant qu'à longs intervalles un nouveau roman de l'auteur. Mais pour un homme tel que Bokowsky, dont les mots dégoulinent par tous les pores de la peau ce n'est pas suffisant, et il ne peut s'empêcher de continuer à proposer un peu partout, aux journaux américains et Outre-Atlantique, ses poèmes et nouvelles.

     J'avoue que si je me suis plongée avec joie dans ce recueil de lettres, un certain malaise s'est peu à peu instauré ; tout comme j'en aurais ressenti un si j'avais rencontré l'homme en vrai. Sa façon de voir la vie, ses écrits et les autres est par moment assez dérangeant, mais il semblerait que ce soit sa marque de fabrique. J'ai beaucoup plus apprécié cette sorte de maturité qu'il a acquise avec le temps. J'ai alors trouvé qu'il prenait plus le temps d'argumenter ses idées plutôt que de les balancer simplement dans le but de choquer le lecteur. J'ai trouvé aussi que son regard sur la vie et le monde littéraire devenait aussi plus incisif et plus réaliste.
     C'est toute cette seconde partie qui me donne envie de découvrir l'auteur, plus à travers ses romans que par ses nouvelles et poèmes. 

     J'ai beaucoup aimé la construction de l'ouvrage vraiment simple : avant les lettres, une petite note nous indique qui est le destinataire si nous ne le connaissons pas et le sort du ou des textes littéraires évoqués dans la lettre de Bukowsky. Les textes ont été judicieusement choisis pour se suivre afin que la lecture soit fluide et les préambules et conclusions inutiles supprimées afin de ne pas perdre le lecteur dans sa découverte de cet auteur.

     Pour moi qui n'ai jamais lu ses textes, je trouve que c'est une très bonne introduction à ses oeuvres, car on découvre l'homme qu'il était, sans masques ni faut semblants. Ce recueil permet de soulever avec délicatesse le voile sur son intimité d'écrivain, sans se perdre dans les autres aspects de sa vie ; car pour moi seul l'homme en tant qu'écrivain est intéressant, ce qu'il fait de sa vie privée ne m'intéresse pas.

     C'est un ouvrage qui saura ravir tout à la fois les amoureux de cet auteur tout comme les curieux qui se demande simplement qui il est avant de se plonger dans ses oeuvres.

Ma question est la suivante : est-ce qu'un auteur à partir du moment où il est publié devient une propriété publique susceptible d'être fouillée sans préavis ou détient-il encore quelques droits à une vie privée en tant que citoyen qui paye ses impôts ? Serait-ce vulgaire de dire que le seul avantage à être artiste reste (encore) la possibilité de prendre ses distances vis-à-vis d'une société sur le déclin, ou s'agit-il simplement d'un concept tombé en désuétude ? 

Est-ce que c'est la suite logique quand tu t'adonnes à la poésie ? Est-ce que tout finit par s'effondrer ? Ton boulot, ta vie, ta femme, ton pays, ton esprit, tout sauf ton amour des mots et le son qu'ils produisent quand on les sculpte, sculpte, sculpte, la sculpture... o mon dieu oui


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